moon sinner ((CHERNOBOG))

Le firmament épousait chacune de tes cellules. La lune auréolait ta carnation - la première entre toutes, cette chair dans laquelle tu te mouvait, symbole et idée faite d'os et de sang. Tu respirais, tu goûtais la saveur des sapins lorsque ton souffle cognait contre ta langue, et le poids, lourd et tangible, du marteau à ta hanche, le picotement du froid dans la longue barbe. Tout était délicieux, nouveau, vivant. Et, les yeux noirs qui se posent sur les humains, agenouillés dans la boue, là où est leur place. Ils ont allumés des feux, formant de plus grandes ombres, à ton grand bonheur. Une main se lève et des créatures obscures s'élèvent dans la nuit, yeux comme des étoiles dures, carnassiers aussitôt disparus dans ces forêts éternelles, ancestrales. Tes larges pieds foulent le sol, tu sens le poids de tes muscles, la chaleur de ton sang, ton dextre est pâle, sous l'astre lunaire. Ils entonnent une mélopée sinistre en ton honneur. Si le soleil leur offre sa bénédiction, sa chaleur, la nuit leur fait peur. Tu es la nuit, Chernobog, tu es l'obscurité, les ombres et ce qui s'y tapis. Tu es le monstre derrière les arbres, tu es le sang que l'on découvre au petit matin, tu es la lune, ses étoiles et le dai d'encre qui voûte ses doigts sur le monde. Ils ont peur de toi - et tu te repais de cette terreur emplie de foi. L'immense marteau trouve sa place dans ta main, contre les cals de ta peau, et tu as la sensation d'avoir fait cela depuis la nuit des temps. Ils prient, non pour ta bienveillance, car tu n'en possèdes pas, mais pour la vengeance, pour que la nuit que tu apportes tende ses griffes jusqu'à leurs ennemis. Tu as soif de sang, Chernobog, et ils prient en ton honneur. Comme c'était bon, en ce temps-là, de sentir leur frénésie guerrière, de sentir se ficher en toi les échardes de leur terreur nocturne. Si ton frère solaire était adoré, tu étais vénéré par la crainte de ce que tu es, un dieu mauvais et corrupteur, et chacun de ces mortels était mauvais, à sa façon. On ne peut éteindre le désir du combat, l'ardeur de la violence, la jalousie, la mauvaiseté. L'humain est un noyau d'horreur et de souillure, et père de la nuit, tu te faisais plaisir à leur accorder tes bienfaits - la violence pour expier la vengeance, le sang et les larmes, la peur, la folie guerrière, la démence frénétique. Tu offrais des nuits douces aux guerriers repentis, tu te faisais père plus tendre avec les meilleurs d'entre eux, d'une loyauté sans faille à ceux qui perpétuaient tes valeurs féroces.

Tes différentes peaux possédaient toutes cette force colossale du héros guerrier. Quel honneur était-ce, alors, que tu t'incarnas dans la chair d'un fidèle. Leurs résonnances avec ton essence était si belles. Quelles sauvageries perpétuées en ton nom. Les loups hurlaient, au firmament trompeur, et les forêts se dressaient fière et sauvages. Puis, l'humanité changea. L'évolution. Les guerres prenaient des tournures différentes, la bestialité sanglante toujours omniprésente, mais la nuit avait cessé d'effrayer autant. De maître ténébreux, ton pouvoir se mit à s'affaiblir, et tes incarnations à se faire de plus en plus rares. Au faîte de ta gloire, tu avais créé les strigoïs, créatures du monde nocturne, tes enfants, tes préférés. Tu les aimais, comme on aime voir sa descendance perpétuer ses valeurs, et si tu leur étais fidèle, tu aimais les voir ravager le monde, tu aimais découvrir leur violence intrinsèque. Tu étais leur patriarche, mais ton pouvoir s'étiolant, tu les délaissas pour te concentrer sur toi-même, sur cette perte de foi qui t'écoeurait autant qu'elle t'indignait. Pouvait-on cesser de croire en la nuit même ?! C'était impossible. Pourtant, telle une fleur, tu dépérissais. L'homme avançait, pas après pas, sur une route qui l'éloignait des antiques forêts, des haches et des villages connus, créant des pavés en des villes de pierres, puis de ciment, et la nuit cessât d'être l'origine de leurs terreurs. Où avaient-ils appris à conquérir l'obscurité ? Le feu, puis l'électricité - ennemies qui formaient des ombres, mais qui atténuaient les peurs de ces dernières. Et malgré tes réincarnations, tu ne pouvais que gronder tout bas, à chaque fois plus faible, à chaque fois moins toi-même.

Jusqu'à ce que tu revêtes cette peau, juvénile, à peine mâle. Quelle ineptie, quelle humiliation ! Tempête interne dans ce corps trop loin de tes idéaux guerriers, tu apprends pourtant à manier ce corps, à apprécier sa vivacité et sa grâce, son habileté. Peu à peu, tu prends possession de lui, incarne ta violence et ton essence ancestrale à ce visage poupin. Et, quand tu vois autrui te prendre pour menue monnaie, ta colère laisse place au stratège nocturne. Tu es invisible aux yeux des grands, et tu peux d'autant plus mener tes pantins depuis les ombres. Sourire décharné aux lippes, tu dévoiles aux rares élus tes véritables penchants et ne tardes pas à prendre possession de certains souterrains de Paris, ainsi que d'un gang pour faire main mise sur la lie de l'humanité. Tu as toujours veillé sur les tiens - les strigoïs, et est venu le temps de te montrer à eux, très bientôt. Leur existence même est une preuve de la tienne, et tes enfants te serviront à asseoir ton pouvoir. Dans ces guerres intestines, tu ne tiens pas à te laisser damer le pion. Dans tes petits jeux pervers et violents dont tu te repais, tu comptes bien attirer à toi les sombres, les impies et les souillés, les perdus, les guerriers et les damnés.

Blabla couleur des divins

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Blabla  couleur des humains

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Blabla couleur des créatures

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