Not gonna die (Esus et Caraïbe)

Sujet: Not gonna die (Esus et Caraïbe) Dim 25 Sep - 22:10

Not gonna die

Son coeur avait cessé de battre dans sa poitrine, elle trainait dans les rues telle une coquille sans âme, noyée dans ses idées noires, sa tristesse, incapable de pleurer. Alexandre était mort. Plus jamais il ne lui parlerait de son métier pendant des heures, lui apprenant de nouvelles choses tandis qu’elle l’écoutait, passionnée, s’abreuvant aussi bien de ses paroles que de la beauté de son visage. Il n’était plus, il reposait désormais en paix, comme on dit… Elle repensa à leur rencontre, la façon dont il l’avait fait sursauter… Son regard, son sourire… Plus jamais elle ne sentirait la douceur de ses baisers, la chaleur de ses caresses, la force de sa virilité pendant l’amour…

Les derniers mois avaient été particulièrement durs à vivre pour la pauvre Caraïbe qui avait perdu ses grands-parents et son frère jumeau, était tombée enceinte d’Esus sans le vouloir et avait perdu le bébé alors qu’elle avait découvert, à sa plus grande surprise, qu’elle voulait devenir maman, qu’elle était prête à ça, et ce malgré le fait qu’elle n’était pas en couple avec Esus. Elle avait été harcelée par des fantômes qui avaient fait naître en son cœur de lourds doutes… Peut-être était-ce le stress qui avait causé sa fausse-couche…

C’était trop pour la pauvre jeune femme qui n’avait plus de larmes pour pleurer, plus de forces pour lutter, plus aucune envie de vivre. De quoi pouvait bien servir de se lever jour après jour alors qu’elle avait perdue le seul homme dont elle fut tombée amoureuse depuis longtemps, que sa famille était décimée ?

Elle marchait sans but, du moins pas de manière consciente, ses pas la menant vers la gare ferroviaire. Le train… Et si… Après tout c’était rapide, il suffirait d’un peu de courage pour partir loin de tout…

Elle était comme dans un état second, regardant les voies, trop au bord pour sa propre sécurité. On lui demanda de s’écarter du bord, elle regarda l’homme qui lui avait parlé sans vraiment le voir, s’éloigna, et recommença. Un train était sur le départ et elle tout au bout du quai, bien trop loin pour monter dedans… Un pas, et un autre. Son pied ne rencontra plus le sol en-dessous, elle était prête à sauter. Ce serait trop rapide pour qu’elle ait conscience de la moindre douleur. Mais on la rattrapa, au dernier moment.

Elle voulait le frapper, elle voulait hurler, elle voulait pleurer, elle voulait se débattre. Elle était juste capable de le regarder. Et de le reconnaître.

-Esus ? Murmura-t-elle, surprise de le voir ici.

Halloween

Not gonna die

10/04/2021 - @Caraïbe de Rochebrune

Bientôt deux semaines depuis notre dernière bataille contre les nordiques. Presque une semaine que Ceridwen et moi avions crevé l'abcès de notre relation suite à ma décision unilatérale qu'elle n'avait pu que subir jusqu'à cette discussion. Caraïbe elle, avait fait une fausse couche et je l'avais accompagné dans l'ambulance. Puis quelques jours plus tard, alors que j'étais sorti pour participer à l'effort de guerre, elle était partie de chez moi. J'avais trouvé son post-it sur la table en rentrant. Et depuis silence radio, elle n'avait plus répondu à mes messages ou mes appels. J'avais décidé de lui laisser le temps pour digérer cet évènement. Pour ma part ç'avait été un peu étrange. Moi qui était prêt à accueillir cet enfant, voilà qu'il ne viendrait plus. Je n'avais pas ressenti de la tristesse, juste un sentiment bizarre, comme une occasion manquée. Mais cela n'était-il pas préférable au final vues les circonstances.

Et aujourd'hui, si j'avais pris une pause dans ma quête d'alliés ou d'informations, c'était parce que son répondeur indiquait que la boite était pleine. Vu son caractère particulier je pris la décision d'aller chez elle. Elle n'était qu'un plan cul il y a peu de temps, mais avoir failli être parents m'avait amené à éprouver pour elle un certain attachement. Rien à voir avec celui que j'éprouvais pour Ceridwen, ou la relation que j'avais avec Meduna. Mais il était indéniable qu'elle n'était plus une simple humaine à présent. Quelque part j'espérais ne pas la découvrir dévorée par ses chats, surtout si je devais changer leur litière.

Depuis le temps maintenant je savais qu'elle se rendait à son travail en métro, sans savoir si elle avait fini par démissionner ou non. Aussi me décidai-je pour passer chez elle avant d'aller à sa bibliothèque si jamais je ne la trouvais pas. Je croyais me souvenir de la ligne qu'elle empruntait pour son trajet quotidien, aussi y allai-je en étant déterminé à la trouver. Patientant sur le quai du métro, j'étais perdu dans mes pensées lorsque j'entendis quelqu'un dont la voix sortit du lot. Apparemment quelqu'un s'était trop approché du bord du quai. J'étais parti pour m'en contrefoutre lorsqu'en jetant un oeil dans la direction concernée je la vis. Caraïbe.

Qu'est-ce que... En la voyant s'approcher du bord du quai, mais pas devant le train, je bondis pour la rejoindre. Peu importait le monde autour, j'avançai plus vite qu'un humain lambda pour l'attraper, ayant fait le lien avec la voix entendue plus tôt. L'attrapant dans le dos par la chemise, je la tirai en arrière juste avant que le métro ne démarre et ne lui passe devant.

Putain Caraïbe, qu'est-ce que tu branles? lui dis-je avant de l'amener au milieu du quai, puis de la prendre dans mes bras. Même si c'était pour la bloquer et l'empêcher de repartir comme un chien trop content de se barrer quand la laisse échappait à son maître, il s'agissait aussi d'un bref élan de psychologie à deux balles pour qu'elle se sente un minimum dans un cadre sûr.

T'as cinq minutes, et après je te ramène chez moi. lui dis-je d'un ton qui ne souffrirait d'aucune contradiction. Inutile de protester, t'as pas la carrure. ajoutai-je avant même qu'elle n'ait eu le temps de refuser.

Not gonna die

Dans le sablier de la Vie elle ne représentait qu’un minuscule grain de sable négligeable, une poussière sans la moindre importance aussi ne comprit-elle pas pourquoi il l’empêcha de mettre fin à son existence. Depuis qu’il arpentait cette Terre, Esus en avait vu des personnes mourir, de simples humains qu’il avait aussitôt oublié. Alors pourquoi se fâcher contre elle d’avoir voulu prendre une nouvelle fois la fuite, cette fois de façon définitive, de sorte à mettre fin à ses souffrances ? Elle n’avait aucune foutue importance dans ce monde de plus en plus à la dérive alors qu’est-ce qu’il en avait à foutre nom de dieu ? Pourquoi la serre contre lui comme si elle comptait un tant soit peu à ses yeux ? Des plans culs il en trouverait d’autres : des plus belles, des plus sexys, des plus dévergondées, des meilleurs coups… Elle n’avait rien de plus que les autres, elle n’était rien qu’une pauvre conne. Alors pourquoi bordel, POURQUOI ?

La Caraïbe normale (si tant est qu’elle ait jamais réellement existé celle-là…) aurait ressenti quelque chose à se sentir serrer contre le puissant torse d’Esus : de l’excitation, du bien-être peut-être, mais la suicidaire de ce jour ne ressentit absolument rien. Elle ne tenta même pas de s’enfuir, elle resta là, les bras ballant, incapable de bouger, de rien dire, de réagir…Une simple marionnette entre les bras de ce dieu bien trop gentil avec elle. Elle ne méritait pas qu’il se comporte ainsi avec elle, elle avait perdu l’enfant qu’elle portait, leur enfant, et en plus l’avait laissé avec une simple note, repartant avec ses chats et ses affaires, ignorant ses appels…Ignorant tous les appels de tout le monde. Elle ne s’était offert, depuis sa fausse-couche, qu’une sortie au cinéma et la soirée s’était conclue par la mort d’Alexandre… Alex…

Les paroles d’Esus la ramenèrent, quelque peu, à la raison…Enfin à la raison n’en demandons pas trop non plus à la pauvre demoiselle disons plutôt qu’elle revint, grâce à la voix de mâle de Maël, à la réalité. Elle avait failli se foutre sous le métro. Il l’en avait empêché. Bon… Bah ce serait pour la prochaine fois hein… Ses chats ? Oh mais ses chats étaient en sécurité, elle n’avait quand même pas perdu les pédales à ce point. Ils étaient dans la demeure de ses grands-parents, entourés des soins affectueux des domestiques. La chance d’avoir du personnel adorant les animaux… Elle n’était pas inquiète pour Hadès et Ursula.

Parce qu’il parla de la ramener chez lui elle secoua la tête. Non… Une faible protestation. Elle était dans un état déplorable, lamentable. Enfoncée dans la dépression elle n’avait même plus eu la force de se doucher ou de prendre un bain, ses cheveux étaient ternes, gras, retenus dans un chignon mal fait parce que pas coiffés, ses vêtements… Oh ils étaient propres mais chez elle le tas de linge sale s’accumulait, bientôt elle n’aurait plus rien à se mettre. Ce dont elle se foutait vu qu’elle pensait pas y retourner, chez elle. Que sa mère se démerde après tout elle avait jamais demandé à venir au monde putain !

-Je…Non…Parvint-elle à dire, d’une voix éteinte. -Laisse-moi…

Dans sa vision pessimiste de la vie et du monde elle avait tout perdu. Rien ne valait plus la peine de se battre, de vivre… De toute façon à quoi bon ? Continuer à vivre c’était reculer pour mieux sauter vu que quelque soit le chemin que l’on emprunte le terminus reste toujours le même. Mais cela un dieu ne pouvait pas le comprendre… « Poussière tu es et poussière tu redeviendras » ou un truc du genre… Une connerie biblique, lui semblait-il, mais possédant un fond de vérité.

-Pourquoi t’occuper de moi ? Demanda-t-elle sans que l’expression de son visage ne change. Ton monocorde, regard éteint. Pas même la plus petite flamme de révolte, de colère. Comme si…Comme si un Détraqueur était sorti de ses livres d’Harry Potter pour aspirer son âme hors de son corps. Coquille vide.

Halloween

Not gonna die

10/04/2021 - @Caraïbe de Rochebrune

Ta gueule Caraïbe. lui dis-je en lâchant un soupir agacé, me frottant le front pour essayer de savoir quoi foutre d'elle. Qu'elle puisse être attachée à notre gosse qu'elle n'avait jamais pondu ok, j'en avais vu des parents ne pas se remettre de la mort de leur mioche. Quelque part moi-même ça m'avait un peu fait chier que finalement on ne l'ait pas cet enfant, mais de là à vouloir se suicider? Sérieusement? Idiots d'humains, eux qui avaient une date de péremption, ils étaient si prompts à vouloir prendre les devants et connaître ce qui équivalait à la mort véritable pour nous autres divins.

Si c'est pour dire de la merde autant que tu la fermes. Parce qu'après avoir sauvé ton cul non je ne vais pas te laisser. ajoutai-je en la regardant, avant qu'elle ne me pose une question débile.

Parce que personne ne suce aussi bien que toi? Évidemment, après tout je ne suis qu'Esus. Pourquoi est-ce que je me soucierais d'une humaine à part pour ses talents. lui dis-je en soutenant son regard sans sourire pour autant. Il n'y avait qu'elle pour poser des questions à la con en toutes circonstances.

Je ne vais pas te laisser seule, même si je ne vais pas pouvoir rester avec toi tout le temps. Mais j'ai peut-être quelqu'un qui pourra s'assurer que tu ne fasses pas un nouvel essai. lui dis-je d'abord, pensant à l'héritière à qui j'avais rendu son collier familial. Quel que part ça me faisait chier de griller un contrat mais bon, Caraïbe avait peut-être un peu plus de valeur qu'une simple humaine.

Pourquoi tu veux crever? lui demandai-je pour en savoir un peu plus. Y a eu autre chose? lui demandai-je encore sans préciser que cela signifiait "autre chose que notre gosse".

Allez, bouge ton cul, je t'emmène. On passe chez moi, ce sera mieux qu'ici. Je te déposerai ailleurs ensuite pour que tu sois tranquille mais pas seule. Sur le chemin je veux que tu m'expliques. Ensuite, tu deviendras une fidèle celte, ça te filera une sécurité et des gens qui prendront soin de toi, plus ou moins. ajoutai-je en reconsidérant l'idée. En vérité il y avait peu de personnes qui se soucierait d'elle, mais il était possible que quelques unes des divinités celtes parmi les miens accepteraient de s'en occuper le temps que j'aille me mettre sur la gueule des nordiques. La guidant à l'extérieur de la station, je commandais sur le chemin un uber pour un retour plus rapide chez moi.

T'en profiteras pour prendre une douche aussi, parce que désolé mais tu pues. ajoutai-je sans rire, à nouveau, tout en envoyant un message avec mon portable en parallèle.

Not gonna die

Elle écarquilla les yeux tout en le regardant, surprise de la violence de ses propos ainsi que de l’amertume qu’elle avait entendu dans sa voix. (À tous les coups elle l’avait imaginée allez savoir avec elle…) A aucun moment elle n’avait voulu l’offenser ni même insinuer qu’il ne pouvait pas s’intéresser sincèrement à quelqu’un de quelque façon que ce soit sorti du cul, c’était juste qu’une fois encore elle montrait à quel point elle se tenait en haute estime (bonjour ironie ça faisait longtemps qu’on t’avait pas croisée tiens !)

-Ce n’est pas ce que j’ai voulu dire Esus… Murmura-t-elle en le regardant, une petite larme à l’œil. Tiens ? Elles étaient pas asséchées elles, depuis le temps qu’elle chialait ?

Notre Caraïbe de Rochebrune habituelle, celle au caractère de merde, incompréhensible et compliqué, aurait paniqué complet et aurait tenté de trouver une excuse pour prendre la fuite et éviter d’aller chez qui que ce soit, d’autant plus une personne qu’elle ne connaissait pas, mais ce jour-là elle était comme une marionnette de chiffon entre les mains d’Esus aussi ne protesta-t-elle pas. S’il avait été le genre barbare à abuser des femmes il aurait pu faire sa petite affaire sans qu’elle ne se débatte… Mais connaissant Esus les étoiles de mer au plumard ? Non merci !

Lorsqu’il lui demanda si quelque chose d’autre était arrivé il n’eut pas besoin de préciser à quelle chose il pensait exactement parce que sa fausse-couche était présente dans presque toutes ses pensées, elle faisait partie des deux obsessions qui tournaient en boucle dans son esprit sans qu’elle ne puisse l’oublier ne serait-ce qu’une minute entière. Et dire qu’elle avait voulu avorter ! Quel était donc le dieu cruel qui avait décidé qu’elle verrait l’échographie et que ça la bouleverserait au point qu’elle voudrait devenir mère ? Enfoiré de salaud !

Elle n’eut pas le courage de parler d’Alexandre, de son décès et de ce que ça représentait pour elle de l’avoir perdu aussi, pas en cet endroit, sur ce quai de métro sordide et puant la pisse. Pas lui. Il avait été une lumière, une fontaine rafraichissante, un tourbillon de plaisirs et de culture qui méritait bien mieux que cet endroit. Elle sentit l’unique larme à son œil couler le long de sa joue. Elle ferma les paupières et acquiesça, en un lent hochement de tête, sans rien dire de plus. Plus tard, elle le lui dirait, plus tard. En cet instant de détresse elle ne pensait plus aux fantômes de sa famille, de sa Bonne-Maman lui ayant intimé l’ordre de se méfier d’Esus, distillant le doute dans son cœur. Elle ne voyait que sa gentillesse cachée derrière ses mots abruptes.

-Je te suis…Murmura-t-elle tout en sachant pertinemment qu’elle n’avait pas le choix, qu’il ne la laisserait pas partir et qu’elle n’avait pas la force physique de se débarrasser de lui et que si elle prenait la fuite en courant il la rattraperait sans faire trop d’efforts.

-D’accord. Murmura-t-elle encore lorsqu’il lui dit qu’une fois chez lui elle devrait prendre une douche parce qu’elle puait. Ouais ça c’était clair, il lui manquait plus que les mouches autour de la tête comme dans les dessins animés depuis le temps qu’elle avait délaissé son hygiène corporelle… Elle qui était incapable de se coucher sans s’être lavée… Le mec du Uber la regarda en fronçant les sourcils mais sans faire de commentaires, de toutes façons elle s’en foutait éperdument. Elle fit le trajet en silence, la tête appuyée contre la vitre, ses cheveux gras y laissant une trace qu’elle ne vit pas, ses yeux n’imprimant rien du paysage défilant sous ses yeux. Elle était perdue dans ses pensées au point qu’elle ne réalisé pas tout de suite qu’ils étaient arrivés.

Une fois chez Esus elle resta un instant sans bouger dans l’entrée puis, machinalement, ses pas la portèrent vers la douche. Un peu mal élevée pour le coup la petite Caraïbe puisqu’elle ne dit rien au dieu, ne lui demanda pas si elle pouvait y aller de suite. Bon en soit elle obéissait à ce qu’il avait dit.

Elle y resta longtemps sous la douche, à se laver utilisant pour ce faire les produits d’hygiène corporelle du dieu puisqu’elle n’avait pas les siens. Elle s’appuya dos contre la paroi de la douche, glissant lentement au sol, l’eau coulant sur son corps, sans plus bouger. Anesthésiée, incapable de bouger ou même de penser, son esprit étant comme vide. Les minutes s’écoulèrent, elle termina l’eau chaude et ne revint à la raison que lorsqu’elle sursauta au contact de l’eau glacée. Et merde ! Et si Esus voulait se laver ?

-Tu as des fringues à me prêter, s’il te plaît ?

Elle était sortie de la salle de bain, pieds nus, une serviette autour de son corps, les cheveux mouillés collés à son dos. Ils n’avaient pas pensés à ça : elle n’avait pas de change.

Halloween

Not gonna die

10/04/2021 - @Caraïbe de Rochebrune

Je sais, bécasse... lui dis-je alors que la Caraïbe que je connaissais ressurgit l'espace d'un instant derrière le zombie suicidaire. Le trajet avait été silencieux, aucun de nous deux ne parlant plus tout du long. Elle aurait probablement compris qu'il ne lui servirait à rien de pleurnicher pour que je la laisse seule désormais. Tout comme j'avais compris que la conversation allait être compliquée pour obtenir de vraies réponses.

Une fois chez moi je la laissai aller se laver, quand bien-même elle mit trois plombes à sortir de la flotte. Pour autant je ne lui en fis pas la remarque, mes narines tellement reconnaissantes que toute l'eau de la capitale pouvait à nouveau l'inonder si cela me préservait de son odeur de clodo.

Comme si c'était un problème. lui dis-je en m'écartant du plan de travail du coin cuisine de mon loft. J'avais mis au micro-onde un reste de repas de la veille si jamais elle avait faim. Je posai le verre que je m'étais servi et que j'avais entamé en l'attendant. J'ai quelques affaires laissées par l'un ou l'autre de mes plans culs, je vais te chercher ça. lui dis-je en la laissant quelques minutes, le temps de faire un aller-retour dans la mezzanine où se trouvait la chambre d'ami. C'était là que j'y foutais ce genre de fringues.

Tiens. lui dis-je en lui tendant un jogging, un débardeur et un sweat. J'me suis dit que c'était pas le moment de te choisir une tenue sexy, j'ai donc opté pour une tenue confortable. lui dis-je avant avant de poursuivre.

Pendant que tu t'habilles je vais te faire réchauffer un truc. Et t'es pas en mesure de refuser de bouffer. Il n'est pas difficile de deviner que t'as oublié de manger en plus de te laver. lui dis-je en regardant mon portable qui venait de s'allumer pour afficher une notification. Je venais de recevoir un message en réponse à ma requête.

Bon, maintenant tu m'expliques? lui dis-je sans que cela ne soit une demande polie. Elle comprendrait facilement que je n'accepterais aucun refus de sa part ou réponse à la con. Elle avait voulu sauter sous le métro, ce n'était pas anodin. Je n'avais pas que ça à foutre, mais pour ce soir la guerre entre panthéons était mise de côté, pour la bibliothécaire qui suçait comme une déesse.

Not gonna die

Un fantôme de sourire aurait pu fleurir sur les lèvres de notre amie suicidaire lorsqu’Esus la traita de bécasse, petit mot doux trahissant chez lui, n’allez surtout pas le lui dire, hein ?!, l’affection qu’il lui portait. Et croyez-le ou non, dans cet état déplorable dans lequel elle se trouvait entre désespoir, doutes et tristesse, cela lui mis un peu de baume au cœur. Malheureusement, lorsque l’on est habité par de noires pensées, et même si cela n’est pas vrai, on se sent terriblement seul et on pense que l’on ne compte pour personne, que si l’on venait à disparaître on ne manquerait à personne et que le monde entier s’en foutrait complètement. Hé ouais elle en était là la p’tite Caraïbe… Foutu hypersensibilité la plongeant dans des états extrêmes !

Dans les sombres méandres de ses tourments naquit un léger sentiment d’amusement lorsqu’il alla chercher dans la chambre d’amis des vêtements ayant appartenus à un de ses nombreux plans culs. Forcément il allait trouver quelque chose à sa taille, vu son succès. Par contre, comment cela se faisait-il qu’il ait en sa possession des fringues de conquêtes ? Il les volait pour en faire collection ? Étranges trophées de chasse mais pourquoi pas ?

Là. Un petit sourire, enfin disons le début d’un petit sourire, vint fleurir sur ses lèvres lorsqu’il lui annonça qu’il n’avait pas choisi de vêtements sexy. Quel couillon…Quel gentil couillon ! Par contre, et là ce fut comme si son cerveau se mettait à nouveau en marche, elle vint à se demander comment il avait jamais jeté son dévolu sur quelqu’un portant un jogging ? Un sweat ? Le genre de fringues ne mettant pas du tout en valeur une meuf ? Soit il était affamé soit malgré ce genre de vêtements la gonzesse devait être à bander comme un taureau… Ce qu’elle ne serait certes pas une fois qu’elle aurait foutu ça… Ce dont elle se foutait royalement là…

Sous ses aspects bourrus il était aux petits soins pour elle, et elle sentit de nouveau des larmes monter à ses yeux mais pas de tristesse cette fois, parce qu’elle était émue, cette conne, de la gentillesse d’Esus. Elle cligna des paupières et après un nouveau merci marmonné le cœur au bord des lèvres, la simple idée d’avaler quoi que ce soit lui filant la nausée, elle retourna dans la salle de bain pour se changer et ranger ce qu’elle avait dérangé. Manquerait plus qu’elle oblige Esus à faire le ménage derrière elle tiens.

Elle retourna dans la cuisine, restant en retrait pour l’observer, les mains dans les poches, la capuche du sweat rabattu sur ses cheveux mouillé. Elle avait moins mauvaise mine mais les cernes sous ses yeux, violettes, faisaient peur.

Elle le savait qu’elle n’allait pas y couper, qu’il voudrait savoir pourquoi elle avait essayé de… elle aurait bien essayé de s’éclipser mais elle connaissait assez le dieu pour savoir qu’il était encore plus entêté qu’elle, et c’était pas peu dire, et en plus avec sa foutu vitesse même Usain Bolt aurait pas été capable de le semer… Saloperies de dieux ! Elle soupira et évita de le regarder pour lui expliquer combien sa fausse-couche l’avait traumatisée, qu’elle s’était renfermée sur elle pour se remettre. Pour ça qu’elle était partie de chez lui comme une voleuse, parce qu’elle avait honte aussi. Encore une chose qu’elle n’avait pas su mener jusqu’au bout : sa grossesse. Peut-être aurait-elle essayé d’en rester là si elle n’avait jeté un coup d’œil à Esus pour lire dans son regard la détermination : il voulait toute la vérité et ne la laisserait pas tant qu’elle n’aurait pas tout dit… Elle soupira et lui parla de sa relation, un tantinet spéciale il faut bien l’avouer, avec Alexandre, de l’incendie au cinéma qui aurait bien pu la tuer (Faut pas oublier que ses petits poumons ont soufferts hein ?!) et sa voix se brisa quand elle vint à parler du décès d’Alexandre…
Elle ferma les yeux, luttant contre les larmes qui lui vinrent à nouveau. Après avoir tant pleuré elle en avait encore à verser, quelle surprise ! Elle les frotta, trop fort, irritant encore plus la peau déjà bien mise à l’épreuve par toutes ses crises précédentes.

La tristesse, le manque de nourriture (non mais c’est quoi cette manie qu’on les bonnes femmes de se venger avec la bouffe dès que ça va pas ? Soit elles arrêtent de bouffer soit elles s’empiffrent vous y pigez quelque chose vous ?) passèrent facture à la demoiselle qui sentit un vertige la prendre. Pour un peu elle se serait écroulée là, par terre… Pour un peu on aurait pu croire que c’était, de sa part, une manœuvre, éculée au possible, pour attirer l’attention d’Esus, le faire user de sa vitesse divine pour venir la prendre dans ses bras, favoriser le contact physique…mais bon. Déjà c’était pas le genre de Caraïbe (quoi que allez savoir) mais avec Esus suffisait de lui dire « j’ai envie de baiser » pour qu’il ait la trique donc… Nah. Elle se reprit tant bien que mal pour aller s’asseoir. Pas de bouffe, que des larmes, et pas de sommeil non plus…le combo gagnant pour une santé de fer !

-Tu dois trouver ça stupide… On était pas vraiment un couple…Je saurais jamais si j’ai vraiment compté pour lui…mais voilà conne comme je suis… je suis tombée amoureuse…

Elle eut un rire sans joie et désabusé avant de cacher son visage entre ses mains. Elle détestait se montrer si faible devant… devant tout le monde en fait mais spécialement Esus parce qu’il était si fort, comme si rien ne pouvait l’atteindre… Stupide et faible femelle !

Halloween

Not gonna die

10/04/2021 - @Caraïbe de Rochebrune

Tandis que je poussais devant elle le repas chaud que je lui avais réchauffé, je l'écoutais avec attention. La fausse couche tout d'abord et son départ soudain de ma demeure, puis la mort de son amant. Vue sa personnalité, pleine et entière, en proie d'ordinaire déjà à une multitude d'émotions puissantes, il n'était pas surprenant que son chagrin l'ait submergé au point de l'amener à vouloir mourir. Nous autres divins avions chacun notre manière d'accuser les nombreux évènements que nous vivions à travers les âges.

Certains s'isolaient, d'autres se trouvaient un ennemi à combattre ou alors ils tentaient de fonder un semblant de famille. Moi-même, face aux décisions de mes frères j'avais choisi de m'éloigner d'eux par le passé. Et nos retrouvailles commençaient déjà parfois à me faire regretter d'avoir accepté de renouer le contact, avec eux et les miens. Si c'était moi que l'on avait estimé parfois récalcitrant au combat, aujourd'hui j'étais pourtant le plus prompt à vouloir lutter contre nos ennemis, et ce sans attendre.

Lorsque l'on manque d'air sous l'eau, il n'y a que deux manières d'espérer s'en sortir. On peut choisir de lutter à la surface, au risque de s'épuiser et de se noyer. Ou alors de se laisser couler pour mieux rebondir sur le fond et nager ensuite à la surface. lui dis-je d'abord avant de poursuivre. Tu as touché le fond Caraïbe, parce que tu étais seule. Maintenant il est temps que tu rebondisses, et je vais t'aider à trouver les ressources nécessaires en toi. Il semblerait que je m'étais attaché un tant soit peu, cela expliquait peut-être pourquoi j'essayais de l'aider au lieu de la séduire pour me l'attacher. Pour autant je souhaitais lui présenter une nouvelle voie pour son existence, une voie que j'espérais lui permettre de vivre.

Deviens fidèle celte Caraïbe, au moins dans un premier temps. Alors tu ne seras plus seule. Pries pour moi, ou n'importe lequel des miens. En échange de quoi tu trouveras refuge auprès des celtes. lui exposai-je sans détour. Et si tu y trouves ton compte, tu pourras alors pousser ta foi davantage. Mais d'abord donne un bon coup de pied au fond de l'eau, et remonte à la surface. repris-je avant de lui désigner son assiette d'un geste du menton.

Mange. lui dis-je sans aucune animosité. L'esprit peut beaucoup, même dans les pires situations. Mais vient un temps où il ne peut faire sans le corps. Et le corps lui a besoin de nourriture. lui expliquai-je avant d'en revenir au sujet de ses dernières paroles.

Bécasse... lui dis-je en lâchant un bref sourire sonore. Les sentiment ne se commandent pas ni ne se jugent. Tu l'as aimé, alors chéris son souvenir et ne te laisse pas dépérir. Si l'immortalité nous a appris une chose c'est bien cela. Qu'importe les peines, avec le temps elles finissent par passer. c'est là que nous avons de la chance avec notre longévité, nous avons plus de temps pour tenter d'y parvenir. Et il se dit dans les prières celtes que que cela nous a apporté la sagesse, même si personnellement j'en doute. ajoutai-je d'un sourire.

N'oublies pas qui tu es Caraïbe-lèvres-de-velour, mais n'oublies pas pour autant d'avancer. dis-je encore sans me départir de mon sourire taquin.

Not gonna die

Si Caraïbe était littéralement épuisée et à bout de forces ce n’était pas seulement parce qu’elle avait perdu le sommeil et qu’elle n’avait plus mangé depuis longtemps mais aussi parce que ses nerfs avaient été mis à rude épreuve car, il faut le savoir, être comme elle était éprouvant. L’incertitude la minait dès le matin de savoir si elle allait aborder la journée de façon positive ou négative, elle se demandait si elle allait rester d’humeur égale ou au contraire soit perdre le peu de maîtrise de ses nerfs qu’elle avait ou alors passer de la bonne humeur au 36ème dessous sans réelle raison, sans aucun signe précurseur lui annonçant qu’elle allait passer de nombreuses journées dans un état d’âme mélancolique, réservé, renfermé, renfrogné, hostile et déprimé. Lorsqu’elle ne subissait pas de grand choc émotionnel elle pouvait encore faire face mais les mois écoulés avaient été rudes et elle avait perdu pieds. C’était comme si elle était dans un océan de larmes au fond duquel elle coulait et Esus, comme s’il avait été Poséïdon (oui on sait les dieux grecs pouarks !), fut son sauveur lui tendant une main secourable. Et là, assise à sa table devant une assiette de soupe elle sentit l’émotion lui étreindre de nouveau la gorge ainsi qu’une grande incompréhension : elle était compliquée à suivre et difficile à supporter, elle en avait tellement conscience qu’elle-même, la plupart du temps se détestait sans le dire à qui que ce soit, alors pourquoi s’encombrerait-il d’une humaine comme elle? Elle n’avait rien de bien, aucune qualité, elle était chiante, avait mauvais caractère, son intelligence était limitée et elle n’avait jamais eu la vraie force de se battre dans sa vie, subissant, se faisant du mal pour oublier celui infligé par la vie… Bref. Elle se voyait comme une erreur de la Nature et sa mort en aurait été la solution au problème. Au moins elle n’aurait plus emmerdé personne avec ses sautes d’humeur de merde et son humour à la con, entre autres… Et là…là elle se sentait coupable. Elle s’en voulait terriblement que Esus, et ça la gênait, se détourne de ses occupations bien plus intéressantes qu’elle, et plus importante, pour s’occuper d’elle comme on prendrait soin d’un gosse malade… Elle fut à deux doigts de lui demander pardon pour cela mais elle n’osa pas parler, de peur qu’il ne l’envoi chier et qu’il ne s’énerve. Il n’aurait plus manqué que ça…

Elle s’était mordue la langue et l’intérieur des joues pour les retenir ces putains de larmes qui finirent pourtant par couler le long de ses joues tandis qu’Esus lui parlait, l’encourageant à devenir fidèle celte afin qu’elle ne soit plus seule. Dans la détresse émotionnelle dans laquelle elle se trouvait le Diable en personne aurait pu lui faire signer un contrat, à la Ursula dans la petite sirène, où elle lui offrait son âme en échange de ne plus se sentir seule, abandonnée, inutile et en trop sur cette putain de planète… Elle repensa vaguement à l’apparition de sa famille la mettant en garde contre lui mais voilà… LUI avait été là au moment où le désespoir avait atteint son paroxysme et qu’elle avait été sur le point de… D’ailleurs en y repensant, et vu l’état de ses bras, elle aurait très bien pu se couper les veines, après tout elle avait déjà la lame de rasoir, alors pourquoi le métro ? Caraïbe et ses incohérences…

-D’accord. S’entendit-elle dire d’une petite voix. D’accord pour devenir une fidèle celte, d’accord pour prier pour lui, d’accord pour…pour lui apporter un plateau de bière le corps dénudé simplement dissimulé par un tablier laissant libre ses seins, qu’en savait-elle au juste ? Mais d’accord. Ce fut comme si elle se jetait dans le vide depuis une très haute falaise. C’était effrayant, et excitant aussi, un peu, parce qu’il y avait dans ce geste une grande inconnue : qu’allait-elle trouver à la fin de la chute ? Allait-elle fendre les flots pour frôler les fonds marins avant de remonter sous l’impulsion ou bien se fracasser la tête contre d’invisibles rochers ?

Lorsqu’il lui ordonna, non parce qu’il avait beau l’avoir dit gentiment c’était quand même un ordre hein ?!, de manger la pauvre fit une grimace de dégoût. Non pas qu’elle doute des talents cuisiniers d’Esus, elle était bien placée, au contraire, pour savoir qu’il était aussi doué pour faire à bouffer que pour baiser, mais la soupe… elle en avait toujours eu horreur, dès sa plus tendre enfance alors quand c’était ce que sa mère faisait aux repas, elle refilait discretos son assiette à son jumeau qui lui adorait ça… Mais bref c’est pas le sujet. Elle fit donc la grimace mais pris quand même la cuillère à côté de l’assiette, la plongea dedans, regarda le liquide, cherchant le courage de la porter à sa bouche et… putain mais elle était vachement bonne ! Une soupe à l’oignon, un vrai délice ! Alors le même mec arrivait à lui donner envie d’avoir un chiard et de bouffer de la soupe ? Mais ?! Ah et de croire aux divinités, ce qui était pas gagné… Chapeau l’artiste.

-Mais…C’est super bon ! S’exclama-t-elle, surprise. Son estomac grogna et elle se jeta sur l’assiette comme une morte de faim. Et pourtant elle avait aucune envie de manger à la base…Comme quoi…

Il la fit rire, la faisant manquer de s'étouffer avec la soupe. Un petit rire bref, mais tout de même, lorsqu’il évoqua la sagesse que leur temps apporte. Et pourtant, en l’écoutant…Bah ouais il avait un fond de sagesse le vieux quand même ! Mais ça elle se garda bien de le lui dire.

Lorsqu’elle eut achevé de manger son assiette elle tourna la tête vers lui, osant enfin lever les yeux pour le remercier. Un simple petit mot de 5 lettres qui signifiaient beaucoup pour elle. Bon ne nous faisons pas d’illusions non plus, elle n’allait pas dès cet instant devenir une personne normale et équilibrée émotionnellement hein ? Faut pas non plus abuser ! Elle se tordit un moment les mains, résistant à une impulsion qui fut pourtant bien plus forte qu’elle. Elle se leva pour s’avancer vers lui, tirant sur les manches du sweat pour ne surtout pas qu’elles glissent et dévoilent ses…conneries, et enlaça Esus.

-Merci. Dit-elle encore, fermant les yeux. Savourant tout simplement la chaleur du corps du dieu. Elle s’apercevait qu’elle s’était attachée à lui contre toute attente, et pas dans un sens romantique ! Qui l’aurait prédit après leur première partie de baise ?

Halloween

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