Problème de tuyauterie m'dame ? [Intrigue I - Terminé]

«Me cago en Dios y en su puta madre! » Depuis la porte des toilettes pour dames, pourtant fermée, un juron blasphématoire poussé par une voix féminine aigüe et portant loin, se fit entendre dans une salle de lecture de la bibliothèque Mazarine. Si certaines personnes présentes dans la salle de lecture attenante relevèrent les yeux, la plupart avec les sourcils froncés, toutes adoptèrent le comportement de base du genre humain : l’indifférence et l’égoïsme. Replongeant dans leurs lectures les hommes et femmes présents ce jour n’eurent pas un mouvement pour aller voir qui avait crié et pourquoi. Peut-être était-ce une dame âgée ayant fait une mauvaise chute et incapable de bouger, non ? Heureusement tel ne fut pas le cas. Enfin…heureusement… Tout dépend du point de vue.

Ce matin-là, en ouvrant les yeux, Caraïbe avait esquissé un sourire tandis qu’elle apercevait, passant entre les rideaux mal fermés, un rayon de soleil. Elle s’était étirée dans son lit en le conservant, son sourire, tandis qu’Ursula et Hadès se levaient paresseusement pour venir se coller à elle en ronronnant : leur façon de lui dire bonjour. Cela peut sembler anodin un petit rayon de soleil mais voilà…notre bibliothécaire, se sentant d’humeur optimiste et laissant parler sa nature espagnole, décida de se vêtir de façon assez légère… Est-il encore besoin de préciser que, pauvre folle, c’était un jour de FIN décembre, en plein hiver donc ? Oh elle allait le regretter mais elle n’en avait pas conscience. Elle avait donc choisi une jupe noire lui arrivant aux genoux, des ballerines plates, un débardeur blanc avec un joli décolleté en V sous lequel elle avait mis un soutien-gorge noir et une veste de velours bordeaux. Tout en chantonnant elle s’était lissé avec application sa noire chevelure et, guillerette, était partie à pied au travail. Mais voilà ! À peine était-elle entré dans la bibliothèque que soudainement (pour elle car elle n’avait prêté AUCUNE attention aux nuages qui couvraient peu à peu le ciel de Paris) un voile sombre avait obscurci l’horizon. Et cela rendait l’intérieur de la bibliothèque assez…lugubre !

La jeune femme, cependant, s’auto-persuada avec un incroyable (et stupide) talent que cela ne durerait guère. Jusqu’au moment où elle vit par les fenêtre que la pluie s’était mise à tomber et pas qu’un petit peu, d’ailleurs… Et cela dura longtemps, longtemps… Et finit par lui porter sur le système nerveux. Envolée sa joyeuse humeur même si elle restait aimable et souriante avec les lecteurs et lectrices qui venaient emprunter un ou plusieurs ouvrages, demander un renseignement ou des conseils…

Comme n’importe quel humain naturellement composé arriva un moment où elle dut faire une petite pause pour soulager certains besoins (car, hé oui messieurs, les dames aussi vont aux toilettes ! Scoop de l’année !) et alors qu’elle se rinçait tranquillement les mains sa maladresse ou sa légendaire chance frappèrent à la porte en se tenant par la main…Et le robinet lui resta dans les siennes, l’éclaboussant d’un puissant jet d’eau. Et la demoiselle avait momentanément enlevé sa veste qui était restée sur la chaise derrière son comptoir… Et c’est donc à ce moment qu’elle poussa son juron. Et sortit de là-dedans : Mouillée, le débardeur transparent et ne cachant plus grand-chose de son anatomie (et encore merci elle avait pensé au soutien-gorge !) le robinet dans une main et se demandant où diable pouvait bien se trouver le maudit robinet général pour couper l’eau avant que la Mazarine ne devienne une réplique du Titanic, les morts en moins… Ou métamorphosés en livres…

Nous disions, donc, un peu plus haut, que personne n’avait bougé en entendant une aussi jeune (quoi que trentenaire tout de même, tic-tac, tic-tac…), jolie et frêle créature jurer comme un charretier dans la langue de Federico García Lorca (certes il est de coutume de dire « la langue de Cervantes » mais voyez-vous si la narratrice de cette histoire voue un certain amour pour les poèmes du premier elle n’a en revanche aucune sympathie que le Don Quichotte du second…) mais ce n’est pas vraiment exact car se leva et vint à sa rencontre un homme musclé le genre que l’on jugerait superficiellement plus enclin à fréquenter une salle de sport qu’une bibliothèque. Comme quoi les apparences sont des grosses menteuses et des… oui non bref ne nous égarons pas sur la crétinerie qui nous pousse à nous juger mutuellement sur une vague image ! (Ceci dit son regard lubrique tandis qu’il la scrutait comme un prédateur affamé aurait peut-être pu l’alarmer sauf qu’elle était déjà paniquée donc elle ne s’en aperçu même pas !) « Si us plau ! Em podria ajudar i donar-me una idea d’on caraï es pot trovar el general de l’aigua dels banys de dona? Es que no ho sé i no para de perdre aïgua i clar no es pot deixar aixi i… » Elle s’interrompit en fronçant les sourcils. Avait-elle remarqué sur le visage de son interlocuteur un air de profonde incompréhension ou encore était-ce que le désagréable son de sa voix avait enfin fait son petit chemin parmi ses oreilles pour arriver à son cerveau ? Toujours est-il qu’il lui avait fallu (à peine, hein ?!) entre trente et quarante mots pour se rendre compte qu’elle si tantôt devant le lavabo elle avait juré en espagnol là elle parlait à un parfait inconnu dans la langue de Joanot Martorell à savoir le catalan plutôt que dans celle si parfaite de Molière qui est celle qui sait le mieux marier l’élégance aux propos les plus orduriers…  Elle inspira longuement, faisant (sans le vouloir) monter et redescendre sa poitrine (souvenez-vous que la dite poitrine n’est plus dissimulée par grand-chose) avant de reprendre, en français cette fois ! (Alléluia ! Le jour de gloire est…pardon.)  « Excusez-moi. Au secours ? Le robinet m’est resté entre les mains… Vous auriez pas, par le plus grand des hasards, une vague d’idée de l’endroit où peut se trouver le général pour couper l’eau ? » Cela faisait quand même quelques années que la demoiselle, un poil grelottante désormais parce que ses cheveux aussi ruisselaient d’eau, travaillait en ces lieux et pourtant…elle était totalement ignorante d’un détail qu’elle demandait pourtant à quelqu’un d’assez étranger à l’endroit…Vous avez dit logique ? Si vous attendez de notre petite catalane qu’elle en fasse usage, de la logique, alors vous allez devoir vous armer de patience…




« halloween »

Si notre chère petite humaine avait eu ne serait-ce qu’une once de croyance en un quelconque dieu elle se serait presque laissée tomber à genoux… Pour remercier LE CIEL bande de pervers à l’esprit mal tourné, pour remercier le ciel de lui avoir envoyé un homme dégourdi dans un des (nombreux) domaines où ses connaissances étaient non pas limitées mais totalement inexistantes et qui avait pris les choses en mains. Et surtout la sienne, d’ailleurs, la tirant derrière lui dans les toilettes comme s’il tirait sur la laisse d’un chien récalcitrant refusant de sortir se promener ou alors de rentrer de promenade. La surprise (et la panique bon sang les livres d’abord les femmes et les enfants peuvent attendre !) cependant l’avait comme pétrifiée et elle fut tout bonnement incapable de protester. Tout comme elle avait été tout bonnement incapable de penser qu’il y avait sûrement moyen de couper l’eau dans les toilettes sans en priver tout l’immeuble ! Mais quelle cruche !

« Je…merci… » Dit-elle en se frappant, tel le super émoticône facepalm, le front de sa main droite alors qu’il se relevait après avoir stoppé l’inondation de la façon la plus enfantine qui soit. Ah si seulement tellement un super-héros du genre Super-Plombier il aurait sorti des outils de sa poche (tel un remake du fameux sac sans fond de Joséphine ange gardien) et lui aurait arrangé tout ça en un tour de main. Ce qui lui fit penser à un mauvais film de boules mais…comment pouvoir chasser cette idée de sa tête quand on vous fait remarquer de façon si…subtile et délicate que vous ne cachez plus grand-chose de la plus belle partie de votre anatomie ? En baissant le regard vers son débardeur Caraïbe, rougissante au possible, constata que son débardeur était devenu transparent (mais pourquoi avoir foutu ce bordel de soutien-gorge en dentelle ?!) et réalisa, ô bon sang, qu’elle était apparue comme ça aux yeux de tous ! En relevant la tête vers lui elle vit l’inconnu qui lui tendait sa veste afin qu’elle puisse se couvrir. Si le geste pouvait passer pour celui d’un gentleman, et elle se dépêcha de la plaquer contre sa poitrine par la dissimuler à son regard, ses propos toutefois…
Hé bien figurez-vous que ses propos la firent éclater de rire ! Hé oui, une autre femme aurait crié au scandale, l’aurait traité de harceleur, de violeur en puissance ou autres âneries prônées par ces cruches qui manifestement ne comprennent rien aux hommes mais notre jeune catalane, elle, éclata de son rire qui ne passait jamais inaperçu. « Merci pour votre veste, monsieur. »

Elle aurait pu s’en tenir là, sortir de là avec lui, aller récupérer sa propre veste pour rendre la sienne au monsieur avant de se faire remplacer le temps de rentrer chez elle pour se changer (et bordel ce qu’elle pouvait en avoir envie à l’instant même !) MAIS ! Mais avec un nouvel éclat de rire (Hé oui il lui était facile de commencer à rire mais jamais vraiment d’arrêter), au lieu de sortir, elle resta plantée devant lui (en cachant toujours sa poitrine quand même !) et lui demanda « Peut-être pourriez-vous envisager de me donner votre nom avant de penser à m’enlever mes vêtements, non ? » Nouveau rire et léger fard en réalisant ses mots. Mais elle continua « Quant à moi je me nomme Caraïbe. Oui. Caraïbe, comme les Îles. Oui, je sais, ce n’est pas un prénom habituel et blablabla épargnez votre salive on a dû me sortir toutes les vannes possibles et inimaginables à propos de ce prénom…Ma maman aimait ce nom, c’est tout ! » Finit-elle en haussant les épaules. Et machinalement, par éducation, pour se présenter, (mais tellement STUPIDEMENT !) elle lui tendit la main. Mais quelle étourdie ! Vous y croyez-vous que cette maladroite la fit tomber dans l’eau ? La veste du pauvre monsieur serviable ?

« halloween »

« Maël » lui avait-il dit se nommer d’un prénom à la douce musicalité qui constatait de façon surprenante avec son apparence plus…rustique. Et cela la fit sourire car le rustique possède un charme indéniable, du moins à ses yeux, et de plus il portait un prénom qu’elle avait toujours aimé. Parce qu’elle avait été élevée ainsi elle prononça un «Enchantée » presque inaudible et, allez savoir pourquoi, du se retenir d’ajouter une blague digne du CM1 « Merlin, enchanteur. » Au lieu de ça elle haussa un sourcil en le voyant abandonner sa veste sur un lavabo parce qu’elle pourrait éventuellement faire plaisir à quelqu’un.  « Dans les toilettes pour dames ? » ne pût-elle se retenir de demander avec une expression clairement sceptique sur le visage.

La proposition de Maël, puisque tel était donc son prénom, la fit, à nouveau, éclater de rire. Rien que de s’imaginer sortant de là, une fois encore, dans cet étant, collant sa poitrine à son dos pour se cacher ou pire dans ses bras… Ah oui ! Deux façons très discrètes de sortir de là. Personne n’allait les regarder avec de grands yeux ronds, c’était sûr et certain ! La jeune femme choisit de retirer ses foutues ballerines qui à cause du contact de l’eau lui faisaient souffrir le martyre et elle choisit tout simplement de…d’aller s’asseoir sur un des lavabos. Et si curieusement elle ne faisait plus tellement d’effort pour cacher sa poitrine (oui bon de toute façon ce n’est pas comme s’il n’avait jamais vu de seins de sa vie, hein ? Et quand elle allait à la plage elle portait un bikini qui ne couvrait pas tellement plus de surface donc bon…enfin pour le soutien-gorge vu qu’elle le combinait avec un short de maillot de bain pour hommes mais ceci est une autre histoire…) mais elle fit quand même attention à ce que sa jupe ce remonte pas trop sur sa peau. Un peu de pudeur, QUE DIABLE !

C’est avec un nouveau rire qu’elle lui répondit. « Ce n’est pas la peine d’aller aussi loin… Il serait dommage que part ma faute mon sauveur se trouve mal, vous ne croyez pas ? dit-elle avec un petit sourire en coin et un petit clin d’œil. « Je travaille ici en tant que bibliothécaire, je ne détruis les robinets que comme hobby, par amour de l’art ! » plaisanta-t-elle. « Et toi tu fais quoi dans la vie à part venir à la rescousse de jeunes demoiselles en détresse tel le preux chevalier servant ? » Questionna-t-elle sans même se rendre compte qu’elle s’était mise à le tutoyer, à l’espagnol. L’air innocent elle rajouta « Tu les regardes toute comme si c’était des proies potentielles ou c’est mon soutif qui te fait cet effet ?


« halloween »

Caraïbe, qui avait le rire facile en ce jour, éclata à nouveau de son rire joyeux. Le mot “fétichisme” lui avait fait penser à un couple qui s’enverrait en l’air dans les toilettes de cette si distinguée institution qu’est la plus ancienne bibliothèque de France. Cela aurait pu la scandaliser mais non, cela l’amusait. (Dites donc demoiselle de Rochebrune serait-ce que d’impures pensées vous habitent quant au monsieur avec qui vous vous trouvez?) Elle voyait l’homme du couple (car oui elle avait imaginé assez conventionnellement un couple hétérosexuel) se rincer l’engin une fois sa petite affaire faite, de façon peut-être pas très distinguée mais au moins hygiénique – enfin pour lui pas pour celles qui viendraient par la suite se laver les mimines- dans le lavabo- et du coin de l’oeil voir cette veste abandonnée là, la trouver à son goût et sans se poser plus de questions l’enfiler avant de sortir tranquillement de là, de façon très naturelle.

Elle le regarda un moment, sourcil froncé, l’air pince-sans-rire. “Oh, vraiment? Je t’aurais jamais imaginé en tant que gigolo mais pourquoi pas? Même si franchement j’ai l’impression que tu serais engoncé dans un costard, même de luxe. Et tu prends combien pour tes…services? “ Demanda-t-elle avec un clin d’oeil tout en balançant une de ses jambes dans le vide, sans faire attention que sa jupe remontait le long de sa cuisse. Ou peut-être, justement, qu’elle en était parfaitement consciente. Elle pouvait avoir des réactions d’enfant, parfois, (souvent même) mais elle savait encore (quoi que pas toujours) quand elle éveillait le désir chez un homme. Surtout que les propos qui lui tint par la suite la confirmèrent dans son idée, lui firent plaisir aussi et la firent sourire surtout. Elle trouvait aussi mignon qu’il se contente de lui faire comprendre, en effet, que sa tenue la mettait en valeur et qu’il avait envie de croquer le fruit sans pour autant essayer de le cueillir: non il attendait voir s’il était assez mûr pour lui tomber dans la main. Mignon, prudent aussi, respectueux mais aussi frustrant.

Elle se leva donc du lavabo sur lequel elle était assise (pas folle la guêpe elle en avait choisi un sec même si sa jupe était mouillée…) et s’approcha de Maël, posant sa main sur son torse musclé, le regardant droit dans les yeux avec un petit sourire. Se hissant sur la pointe des pieds elle déposa doucement ses lèvres sur les siennes. (Dans un livre ou un film la petite aurait eu la clef sur elle pour s’assurer que personne ne pourrait les surprendre et aurait eu une excuse bidon si jamais on avait voulu ouvrir la porte de dehors…les problèmes de plomberie, la poignée cassée… allez savoir mais la réalité n’est jamais aussi arrangeante, n’est-ce pas?) Elle s’éloigna un peu de lui et enleva son débardeur (Pas comme s’il cachait grand-chose, de toute façon. Le prenant par une main elle le conduisit jusqu’au lavabo où elle se hissa de nouveau, posant son débardeur à l’aveugle, au petit bonheur la chance sans se soucier de savoir s’il n’allait pas tomber dans l’eau… (Et passer des vêtements mouillés? QUELLE HORREUR!) Le tirant toujours d’une main, avec douceur, elle l’attira entre ses cuisses qu’elle referma sur ses fesses, lui prit le visage entre les mains et l’embrassa passionnément.


« halloween »

Caraïbe fronça les sourcils en se rendant compte car aux délicieuses caresses de Maël qu’elle avait…omis de mettre une petite culotte faisant par-là même preuve de la pire distraction dont elle n’avait jamais été victime. Oublier. De. Mettre. Sa. Petite. Culotte. Elle se martela (oui, oui, de cette façon !)  Ces mots dans sa tête, ses joues étant devenue de comme bien entendu légèrement rouges ! Alors que trente secondes plus tôt elle poussait « le vice » à glisser son soutif désormais immettable dans la poche du pantalon de Maël…Error 404 logic not found !  



« halloween »

Emportée par le tourbillon de sensations physiques qu’il lui faisait ressentir (et excusez du peu seulement de ses doigts au début, messieurs prenez des cours !) Caraïbe avait presque oublié un léger détail si infime qu’il en devenait insignifiant et c’était qu’ils pouvaient être surpris à tout moment. Ou alors peut-être que, cachant bien son jeu, la demoiselle trouvait la situation excitante, oubliant même sa timidité légendaire…Allez savoir !





« halloween »

Woh. Décidément quand elle s’était réveillée ce matin-là Caraïbe ne s’attendait pas mais alors PAS DU TOUT à ce que la journée prenne un cours aussi… jouissif. (Ah ouais ? Alors pourquoi elle avait pas mis de petite culotte la dévergondée, hein ?! Une étourderie ! Caraïbe a toujours été très distraite, c’est dans sa nature ! Elle a bon dos la distraction…enfin bref !) Après avoir remis sa jupe en place tout en lançant un regard légèrement (voir beaucoup) étonné à Maël suite à son énigmatique phrase qu’elle ne commenta pourtant pas par peur de passer pour une idiote ne comprenant rien à rien (ce qui n’aurait pourtant été ni la première ni la dernière fois de sa vie). Elle avait récupéré son débardeur sur le lavabo et constaté que, malheureusement, il était toujours aussi mouillé… Elle s’attendait à quoi au juste ? Qu’il ait séché grâce à leurs ébats torrides ? Toujours est-il que, pour le moment, la demoiselle resta poitrine dénudée.

Tournant le dos à Maël elle se tenait face au miroir pour arranger, autant que possible,  ses cheveux qui étaient terriblement décoiffés. Tandis qu’il lui disait qu’il aurait bien voulu la rencontrer autrefois elle le regarda à travers le miroir, lui offrant un sourire. Pensant à un simple compliment post-coïtal mais toujours agréable à entendre. Et le terme « autrefois » qui avait une petite saveur de désuétude agréable à l’oreille avec la beauté du français se perdant de plus en plus à cause des « djeuns » et leur langage de « caillera »…  Le sourire s’évanouit et sur son visage vint à s’épanouir une expression partagée entre le doute, l’incompréhension et une pointe d’inquiétude  quant à la santé mentale de Maël quand il parla de « panthéon » mais Caraïbe se dit que peut-être il s’agissait d’un surnom donné à un groupe d’amis.  Un peu étrange mais pourquoi pas ? Et alors qu’elle s’apprêtait à aller sécher son débardeur sous le sèche-main électrique des toilettes, Maël lui posa une question qui la stupéfia. Avant de la faire éclater de rire. Jusqu’aux larmes. Non pas qu’en soit la question soit amusante mais le contexte…

« Tu poses ce genre de questions à toutes tes conquêtes ? » demanda-t-elle quand elle parvint à calmer son fou rire. Fou rire exagéré mais chez elle c’était rare de trouver une quelconque mesure d’équilibre… « C’est la nouvelle méthode de recrutement parce que le culte est en crise ? » plaisanta-t-elle encore avant de redevenir sérieuse, ayant croisé le regard de Maël qui lui semblait l’être terriblement. Sérieux. Elle se retourna vers lui et s’appuya contre le lavabo. Sans aucune luxure cette fois.
« Oh… Tu es sérieux… Je te présente mes excuses… Je… J’espère que je ne vais pas te vexer mais…enfin c’est une immense fumisterie cette histoire de Dieu… On nous bassine avec le soit-disant amour d’un pseudo créateur mais si on se penche un peu plus sur les textes qui seraient divins qu’est-ce que l’on trouve ? Punitions, châtiments, tortures et autres délices du genre… Si l’Homme a été créé à l’image de Dieu cette créature doit être une sacrée pourriture ! Et s’il est censé nous guider pourquoi est-ce qu’il permet que sa création soit ainsi dénaturée ? Pourquoi toutes ces guerres, ces viols, ces meurtres… ? disant ce dernier mot sa voix se brisa. Elle ne pouvait pas ne pas penser à son père et à sa tragique disparition… Elle ferma brièvement les yeux pour chasser les larmes qui montaient et inspira profondément. « Je pense que ce sont des hommes frustrés qui ont inventé toutes ces histoires, depuis la nuit des temps, enfin façon de parler, pour imposer aux hommes et surtout aux femmes un code de conduite restrictif pour que leur vie ne soit qu’un long calvaire… Mais tu sais c’est que mon opinion hein ? Si t’es croyant libre à toi hein tant que tu me demandes pas de croire en l’existence d’une puissance qui laisserait ses créatures se détruire sans agir… Libre arbitre…mon cul ouais le libre-arbitre… Il a bon dos… «   Elle baissa le regard à ces mots, en rougissant. Craignant d’être allée trop loin et de le vexer dans ses croyances. Elle respectait hein ? Tant qu’on l’emmerdait pas avec ces histoires quoi… « Pardon… » Murmura-t-elle.


« halloween »

Elle tenait toujours son débardeur à la main, ayant provisoirement renoncé à le mettre sous le sèche-main histoire de pouvoir cacher à nouveau sa poitrine toujours dénudée et ce avant que quelqu’un ne fasse irruption dans les toilettes pour les trouver dans une situation sans équivoque… Ce qui lui aurait valu quelques petits soucis avec collègues et supérieur voire carrément un licenciement. Elle regardait Maël et l’écoutait parler en ne sachant plus vraiment quoi penser de lui. Certaines paroles auraient pu faire croire qu’il la draguait (juste après l’avoir baisée, très logique…) notamment quand il insinuait qu’elle différentes à ses autres conquêtes, (en quoi ? Allez savoir !), et d’autres étaient presque inquiétants…

Il se prenait pour un dieu. Non pas LE dieu, mais UN dieu comme s’il en existait plusieurs… Un jour, se disait Caraïbe, elle utiliserait son cerveau pour faire un peu plus ample connaissance avant d’écarter ses cuisses. Attention ! Ne me faites pas dire ce que je ne pense pas à savoir que la demoiselle encore jeune était une traînée parce qu’elle jouissait (bien le jeu de mots hein ? Non ?... Ouais j’avoue… ) de sa sexualité comme elle l’entendait : librement. Mais à cet instant elle se disait qu’elle avait peut-être commis une erreur et qu’elle avait eu un petit intermède avec… un fou. Peut-être pas dangereux mais les maniques de la religion sont rarement inoffensifs hein… Une vague image d’elle sacrifiée dans les toilettes avec le nom « Jézabel » écrit sur le ventre avec son propre sang lui traversa l’esprit et la fit légèrement frémir.

Maël sembla lire dans ses pensées, peut-être pas la peur qu’elle commençait à ressentir à son égard mais plutôt son immense scepticisme d’athée qui ne faisait que grandir quant à sa supposée nature divine. Et c’est pourquoi il décida de lui faire une démonstration et la faisant sursauter violemment il brisa un des miroirs au-dessus des lavabos pour prendre un des morceaux de verre. Panique à bord mais au lieu d’attaquer Caraïbe, qui se demandait si elle aurait une quelconque chance de le repousser assez pour sortir d’ici (ok elle savait se battre mais il avait une force presque herculéenne hein !), il le porta à son avant-bras et se fit une entaille assez conséquente sous le regard écarquillée de la jeune femme. Peut-être qu’une autre personne qu’elle aurait poussé un cri, serait sortie de là en appelant à l’aide, qu’un homme avait voulu se suicider ou qu’il se faisait du mal dans les toilettes mais pas elle. Non pas qu’elle fut plus courageuse qu’une autre mais, en réalité, ce geste lui avait fait penser à elle, à son passé, à son secret dont elle gardait des traces sur les bras. Elle regarda brièvement les fines cicatrices sur un de ses bras avant de se rapprocher de Maël. Il lui avait demandé de simplement observer et de ne pas s’inquiéter et c’est ce qu’elle fit. Et sous ses yeux ébahis, au point de quelques minutes qui lui semblèrent une éternité, la plaie commença à guérir et finit par complètement disparaître. Envolée. Pas la moindre trace. Caraïbe releva la tête vers Maël, yeux écarquillés et bouche légèrement entrouverte. Elle se demanda l’espace d’un instant si elle n’était pas devenue complètement folle. Hey mais peut-être que c’était ça le truc… Elle était devenue folle en assistant au meurtre de son père et était depuis tout ce temps enfermée dans un hôpital psychiatrique et tout ce qu’elle avait vécue n’était que pur délire de son cerveau malade… N’importe quoi !

Avec des gestes doux elle se saisit du bras de Maël et passa un doigt à l’endroit où il s’était coupé. Rien. La peau était lisse sous celle de Caraïbe. Elle était sous le choc. « Putain de dieu… » Souffla-t-elle. « Je… » Est-ce que ça irait ? Il en avait de bonnes lui… Il venait d’apprendre et de prouver à une athée convaincue qu’elle était dans l’erreur depuis sa plus tendre enfance et  que les êtres divins existaient réellement… Et il demandait tranquillement si ça allait ? La jeune femme ne dit plus un mot. Elle alla au sèche-main électrique et passa son débardeur dessous et durant de nombreuses minutes il n’y eut plus entre eux que le bruit de l’appareil. Ce fut assez laborieux mais enfin le vêtement fut sec et elle put se rhabiller. Il était flagrant qu’elle ne portait pas de soutien-gorge dessous mais au moins ce n’était plus indécent. Elle récupéra ses chaussures et se dirigea vers la porte et porta la main à la poignée. « J’ai fini ma journée. » Finit-elle par dire, d’un ton assez tranquille. « Je dois prévenir la maintenance pour les dégâts ici. Merci pour ton aide. » Elle sembla hésiter. « On pourrait peut-être aller parler de… ÇA dans un endroit moins humide ? Et à l’abri des oreilles indiscrètes ? » Finit-elle par ajouter avec un petit sourire timide. Des fois elle avait vraiment des réactions à la con… Elle n’aurait pas pu le lui proposer AVANT d’agir comme si elle avait tout simplement décidé de se barre et de le laisser là comme un idiot ? Caraïbe… Elle referma la porte, soudain consciente qu’elle n’avait pas vraiment été cool sur sa réaction. «Excuse-moi Maël… Je dois dire que je m’attendais pas à ça et que… enfin ce que tu viens de me dire… je suis un peu chamboulée. C’est pas évident de se rendre compte que ça fait presque trois décennies qu’on est dans le faux... Ça se bouscule dans ma tête là… je dois avoir un milliard de questions en tête et bon... C’est peut-être pas l’endroit idéal pour en parler… Après je sais pas si les dieux peuvent tomber malade mais moi qui suis une simple mortelle oui et si je vais pas chez moi prendre une douche chaude et me changer je vais finir par avoir la crève… C’est…dur à assimiler et je me demande pourquoi me dire ça à MOI ? Je veux dire…tu viens juste de me rencontrer et je…enfin je suis d’une affligeante banalité j’ai rien d’exceptionnel pour que tu te dévoiles comme ça… Enfin…Ouais. Bref… On peut se retrouver pour en parler ? Enfin si t’as envie de m’en dire plus et que ça te dérange pas quoi... Mais…Au fait… Je dois faire une révérence, te vouvoyer et utiliser un terme genre « Sire » ou un truc du genre ? Nan parce que là ça risque de poser problème quand même hein…  » Explications brouillons, paroles confuses et un peu fourre-tout pour finir par une tentative d’humour à la noix… Caraïbe dans toute sa splendeur quoi!  



« halloween »