Louis Tessier - Taranis, Dieu de l'Orage

•• APPARITION DU PANTHÉON CELTE ••

Je suis né sous le regard protecteur de mon frère, Teutatès, Dieu de la Guerre, de la Justice, Dieu-Père et Protecteur des Tribus et sous les prières d’hommes et de femmes qui craignaient et aimaient tout autant l’Orage, la Foudre et le Ciel. Et puis, sans surprise, Esus, Dieu des bâteliers, naquit et compléta cette trinité redoutable que nous allions former.

Notre aîné apportait la Justice, l’Ordre et la Guerre, j’étais l’indomptable foudre qui tombait impitoyablement sur nos ennemis, et notre plus « jeune » frère apportait la mort sur la mer en coulant ses ennemis sous des flots furieux. Nous avons grandi et gagné en puissance au fur et à mesure que notre influence s’étendait sur les différents esprits, et que d’autres panthéons faiblissaient. Nos noms étaient connus de tous, tantôt aimés, tantôt craints. Nous

En parallèle, nous assistions à la création – ou naissance – de nouvelles divinités dans notre panthéon, apportant chacun leurs aides dans les différents aspects de notre « quotidien », tantôt la gestion et la protection de la Tribu, tantôt la guerre. Malgré quelques dissensions, et querelles, nous nous entendions sous le regard protecteur et attentif du Dieu-Père. Nous étions beaux, nous étions fiers et, surtout, nous étions soudés. Je ne pouvais qu’être fier et heureux, enivré par nos conquêtes, par les femmes et par le vin !

•• APOGÉE DU PANTHÉON CELTE ••

Être au sommet ne signifiait jamais « s’arrêter », mais plutôt crever ce plafond nuageux pour découvrir un nouveau sommet !

Je partageais la soif des guerres et des conquêts de mes frères, et j’apportais mon aide sans compter, et sans aucune hésitation. Mon tempérament rend certaines stratégies bien désuets, désobéissant à quelques reprises à la divinité guerrière, entraînant soit des défaites cuisantes, soit des victoires éclatantes. En vérité, qu’importe la finalité de mon action, j’avais constamment droit aux réprimandes plus ou moins violentes des miens. Malheureusement pour eux, comme pour moi – et l’histoire le prouvera –, qu’importe qu’on me choie ou qu’on me punisse, si je désirais agir à ma guise, je le faisais.

De nous trois, j’étais également celui qui profitait sans compter des joies éphémères ou divines de cette terre. J’aimais, sans compter – mais sans pour autant me fixer – les différentes dames qui vagabondaient sur cette Terre, qu’elles soient d’essence divine, qu’elles soient des créatures bénies ou maudites ou simplement des humaines. Un amour sans partage, et sans préférence, qui causait bien quelques troubles quand j’avais le malheur de séduire deux amies, ou deux sœurs, des femmes mariées ou promises – ou déjà amantes de divinité au sein de notre propre panthéon.

•• DÉCLIN DU PANTHÉON CELTE ••

Esus et moi, malgré quelques désaccords sur les stratégies à adopter, n’avons jamais cessé de travailler main dans la main pour étendre notre influence et écraser autant que possible tous les panthéons – existants ou naissants –. Malheureusement, dans toutes ces prédictions que nous avions faites, jamais nous n’avions pensé que la trahison viendrait de notre propre « sang », et de Teutatès lui-même, pour une amourette ! Le frère protecteur est absent quand la Tribu a cruellement besoin de lui, à compter fleurette et à offrir des galipettes à l’une de nos ennemis.

Si une partie du panthéon peut accepter sa trahison et l’accueillir à nouveau, je me refuse. Si une autre partie accepte de céder terre et influence pour subsister encore, je refuse. N’avions-nous pas sacrifié quantité d’hommes et de puissances en bénédiction et malédiction et en guerre pour apporter cette puissance ? Pourquoi devrions-nous céder quoi que ce soit à ces nouvelles divinités si aisément ? Mon frère avait peut-être cédé pour les beaux yeux de la Nuit, mais je n’avais pas sa faiblesse.

Et pourtant, nous avions été vaincus et j’ai assisté à chaque étape de cette déchéance : la perte de nos territoires pour lesquelles nous avions tant combattus et de la Foi des Hommes, et la désunion et la division de ce panthéon dont j’étais si fier. Et puis, la perte d’Epona, mon plus grand soutien dans cette bataille vaine, fut le coup final et fatal et l’éloignement de Méduna, l’une des rares avec qui je pouvais partager toute ma rancoeur.

•• DEPUIS ••

De Teutatès et d’Esus, j’ai appris respectivement les bases de la gestion d’une Tribu et de la stratégie. Deux apprentissages qui m’ont aidé au fil des siècles, lorsque l’Orage, la Foudre ou le Ciel ne se résumaient plus qu’à des particules et des théories scientifiques. L’Homme devenait plus savant et moi, je devenais plus insignifiant.

Je participe aux batailles, autant que je peux mais j’en perds vite goût. Je prenais plaisir quand il était question de défendre mon panthéon, ou de combattre et de festoyer avec mes frères ... sans eux, le plaisir n’était guère présent. Alors, contre gré, j’ai décidé de montrer plus de curiosité à ces humains et à leurs découvertes qui me crevaient. J’étais là quand les premiers engins volants ont été inauguré, encore là quand les premières expériences sont faites sur l’électricité et encore et toujours là quand son utilisation fut étendue à bien d’autres domaines.

Les connaissances accumulées et mon affinité naturelle avec tout élément du Ciel m’ont permis d’occuper bien des rôles sur ces dernières décennies. Scientifique, météorologue, pilote, ingénieur ... aujourd’hui je suis chef d’entreprise dans le domaine des énergies renouvelables et j’ai su mener rondement l’affaire pour avoir une situation extrêmement aisée.  

•• LA MORT D’ODIN ••

La mort du vieux est tombé au pire moment possible, quand je négociais un contrat important. J’ai blêmi, j’ai été pris de court ... et ces cons d’associés m’ont directement conduit à l’hôpital, en pensant que je faisais une crise ! Dans le fond, c’était un mal pour un bien. J’ai eu le temps de ressentir et de comprendre. La Vraie Mort avait frappé. Si la peur m’avait un instant saisi, elle avait été vite remplacé par un autre sentiment : l’excitation. Une guerre allait reprendre, où il n’était pas question de stupides drones, guerres économiques et j’en passe. Une guerre avec des vaincus et des vainqueurs, avec des vivants et des morts ... et les participants sont les Dieux eux-mêmes et non une population croyante !

J’étais le Dieu de l’Orage, celui qui frappe et non celui qui protège. Qu’on s’attende pas à ce que je m’inquiète pour les miens, c’est le travail d’un certain Dieu-Père. Cependant, j’ai peu d’espoir de lui. Il nous avait déjà abandonné, il serait capable de le refaire.

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