Maquillage pour femme mordue

Sujet: Maquillage pour femme mordue Lun 23 Mai - 0:32

12 Janvier 2022

- Putain. Ce n’est pas possible, marmonnais-je devant le miroir.

Malgré la crème cicatrisante que j’appliquais jour et nuit, la marque de quatre solides dents restait. Je ne sais pas exactement quelle bête m’avait mordu, du moins je le crois au vu de ma propension dégénérative à trouver du réconfort dans quelques drogues douces lors de rituels nocturnes, mais elle avait de sacrées dents. A la simple pensée de cette nuit effroyable, mon ventre se tordait par la peur.

Enfin, aujourd’hui, j’avais à craindre un tout autre homme : mon père. Il s’impatientait sérieusement que je m’entête à porter des foulards ou écharpes à toute heure de la journée. Il avait besoin d’un Gourou qui pourrait enfiler toutes les tenues préconisaient pour telle ou telle cérémonie, et était extrêmement frileux à l’idée de briser cette organisation minutieuse pour quelques caprices. Du moins, c’est ainsi qu’il le voit. Il n’était pas encore au courant de cette blessure. Je ne voulais le montrer à personne … L’humiliation et la honte m’étouffaient, pour une raison qui m’échappe ou plutôt que je refuse d’accepter.

Il me fallait absolument un maquillage bluffant, pour cacher cette maudite marque et, par la même occasion, m’octroyer le luxe d’opter pour la carte du déni. Je voulais oublier cette nuit, même si ce n’était qu’une poignée de minutes, ou d’heures. Mon regard dérive sur un mail reçu récemment, où il était question de quelques promotions dans un magasin de cosmétique des plus reconnus. Parfait ! J’avais besoin de solides cosmétiques, et non de poudres volatiles qui s’envolent au premier coup de cache-nez !

Ma principale difficulté sera de trouver la teinte allant parfaitement à mon teint de peau. Ma peau était trop blanche, à mon grand désespoir. Résultat, beaucoup des fonds de teint avaient tendance à m’offrir un teint orangé, et non un teint naturel. L’horreur ! Je n’avais plus qu’à prier que je n’aurais pas à faire plus d’un magasin de make-up pour trouver mon bonheur … L’espoir fait vivre, dit-on !

***

Je me balade entre les rayons, essayant divers fonds teint. Je n’étais pas regardante sur la texture, ou sur le prix. Poudre, crème, cinq ou cent euros … je me fichais royalement. Il me fallait une teinte naturelle et la tenue longue durée. Si j’avais à opter à acheter plusieurs teintes, et appliquer plusieurs couches, je le ferais tout autant. Cependant, dans le cadre d’une telle prouesse artistique, j’avais besoin de conseil. Or, comment pouvais-je montrer mes marques, sans qu’on appelle un quelconque centre bataillant pour la protection des femmes battues ? La question à un million !

Balayant le magasin d’un regard plein de détresse, celui-ci croise celui d’une femme des plus familières. Je l’avais rencontré, à quelques rares reprises, dans la maison de ma maman. Comme cette dernière, Anthea n’avait pas pris un ride malgré les années, faisant flancher encore et toujours mes plus profondes certitudes. Par politesse, et courtoisie, je m’approche pour la saluer.

- Bonjour Anthéa, ca fait longtemps. Est-ce que tu me reconnais ? Je suis Oyrania Weber, la fille … Enfin, je veux dire, Midnight est ma marraine.

Officiellement, j’avais à fournir ce mensonge au monde entier. Seule une poignée d’hommes et de femmes, choisies par maman elle-même, savaient la vérité. Je ne savais plus si la brunette en face de moi en faisait partie, ou non.

Sujet: Re: Maquillage pour femme mordue Mar 28 Juin - 16:59

Il n’était pas rare que me prenne l’envie de me mêler à mes clients le temps d’une journée. Parfois pour quelques heures, parfois pour une après-midi. Tout dépendait de mon emploi du temps. C’était une façon pour moi de me rendre accessible à mes followers, ce qui bénéficiait à mon image et l’opinion publique, largement en ma faveur. C’était aussi une façon de constater de la renommée de mes produits et d’avoir un regard plus critique sur ceux que l’on boudait. Cela m’était facilité par le fait qu’une boutique dédiée à mes créations se trouvait au rez-de-chaussée du siège social, situé au cœur même de Paris. Je n’avais, alors, qu’à descendre de ma tour pour me mêler à ceux sans qui rien de tout ça ne serait possible.

Ladite boutique ne désemplissait pas, à mon plus grand bonheur ; Je m’en assurai en en faisant le centre névralgique de Kore, en y organisant des avant-premières, des ventes exclusives, des démonstrations, des soirées très privées. Exclusives, même, où je m’assurai d’inviter des personnalités connues de tous. C’était mon temple : j’y organisais mes rites, et j’y accueillais mes fidèles. Ce jour-là, j’avais choisi d’annuler quelques rendez-vous pour dédier mon après-midi à un bain de foule revigorant. Revigorant parce que je me délectais de l’admiration, l’adoration dans leurs regards, qui me nourrissait, me renforçait. Bain de foule parce que les fêtes de fin d’années venaient de se terminer et qu’on était au chassé-croisé des retardataires qui venaient effectuer leurs derniers achats de Noël et de ceux qui venaient dépenser l’argent ou les cartes cadeaux qu’ils avaient reçu de la part de leurs proches.

Le temps – froid et humide – poussait aussi quelques badauds à franchir les portes de ma boutique pour venir chercher un peu de chaleur, errant sans but précis mais disposés à effectuer quelques achats en cas de coup de cœur. Inutile de préciser que je savais m’assurer que coup de cœur il y ait. Enfin, il y avait ceux qui venaient dans un but précis, en quête de guidage. Ceux-là étaient, de loin, mes préférés. J’esquissai un soupir satisfait en regardant s’éloigner deux adolescentes qui venaient, chacune, de repartir avec une édition très limitée de ma nouvelle gamme de soins pour la peau - dédicacée au demeurant !

En parcourant la salle des yeux, je remarquai une silhouette familière. La jeune femme, que je reconnus sitôt qu’elle se tourna vers moi, s’approcha pour me saluer.

“ Oyrania, fis-je. Bien sûr que je me souviens de toi. J’esquissai un sourire affectueux. Tu as tellement grandi ! ”

J’eus un rire léger. Je ne l’avais pas vue depuis des années, probablement depuis son enfance, même si je m’étais efforcée de garder un œil lointain sur elle, de ne jamais trop la perdre de vue sans toutefois interférer avec sa vie. Avec toute l’affection que je portais à Nyx, ma mère chtonienne, c’était la moindre des choses que je pouvais faire pour sa fille.

“ Alors dis-moi, qu'est-ce que tu deviens ? Cela fait si longtemps. ”

Sujet: Re: Maquillage pour femme mordue Ven 22 Juil - 0:54

- Effectivement, nous nous sommes pas vus depuis une dizaine d’années, au moins. Tu n’as absolument pas changé, soulignais-je. Quel est ton secret ?

Si j’ai bien grandi, elle n’a pas vieilli du tout ! Mon regard virevolte des produits cosmétiques au visage inchangé d’Anthéa. Je m’interroge aussitôt : est-ce qu’elle est comme maman, c’est-à-dire une divinité gréco-romaine immuable au temps, et prisonnière de sa fonction ? Ou est-ce que ses produits font de véritables miracles pour combattre les traces du temps ? Je suis divisée, incapable de décider quelle hypothèse est la plus stupide et la plus improbable à la fois.

- J’ai mon master en psychologie depuis quelques années. Maintenant, je me tâte à me lancer dans un doctorat, pour compléter le tout, commençais-je. Je suis assez intéressée par l’impact de la religion sur notre psychologie. Par contre, le sujet est trop large : je dois me montrer plus spécifique.

La spiritualité a toujours occupé une part importante de mon éducation. Dès ma plus tendre enfance, tout mon univers a tourné autour de ma mère – littéralement : son culte, ses rituels, ses prières … Il est rare qu’une semaine passe sans que je ne mentionne une dizaine de fois le nom de Nyx, ou de tout autre divinité du panthéon gréco-romain. Alors, ce choix de thèse coule de source. D’une certaine façon, je veux comprendre moi-même par quelle façon cet héritage a impacté toute mon existence.

- On m’avait dit que tu gérais une marque de cosmétique de luxe. Est-ce celle-là ?

J’en profite pour saisir un fond de teint extrêmement recouvrant, et faire les premiers tests sur cette peau de porcelaine. J’affiche une mine boudeuse : la couleur est trop foncée. Je cherche déjà du regard un démaquillant, et un coton. Les tests vont être nombreux, et je préfère garder uniquement les produits qui me tapent à l’œil ou qui me serviront dans la rude tâche de cacher les cicatrices de morsures, ou de bleus sur le corps même. Certains partisans de la communauté de la Nuit, que je dirige, sont d’anciennes victimes de violences conjugales. A quelques reprises, elles m’ont glissé leurs ruses et astuces cosmétiques pour cacher les sévices de leurs époux ou amants. Etonnamment, il n’est jamais question d’une seule et unique couche. Le maquillage devient un véritable art à maîtriser, et à appliquer sur les deux faces du visage – ou du corps – pour que l’illusion soit parfaite.

En bref, il y a beaucoup de travails.

- En tout cas, j’en ai entendu beaucoup de biens.

Entre temps, je saisis un second flacon. La teinte convient davantage, mais elle jure encore avec mon teint. Si avoir une peau si blanche est une bénédiction en tant que Gourou de la Nuit, notamment lorsqu’il y a des jeux d’ombres et de lumières, c’est une véritable malédiction en termes de make-up. Soit c’est du nude, soit c’est pimpant : il n’y a pas de demi-mesure.

- J’aurais préféré hériter du teint de Midnight, que de mon père, me plaignis-je. Et même lui n’est pas si blanc. Il semble que c’est ma grand-mère maternelle qui l’était. Avant que tu ne partes, aurais-tu des conseils à me donner ?

Sujet: Re: Maquillage pour femme mordue Mar 26 Juil - 22:39

La remarque de la demoiselle m’arracha un sourire amusé. Quel était mon secret ? L’immoralité, bien sûr. Evidemment, je ne pouvais pas lui répondre cela de but en blanc – ou alors, je pouvais. Ce ne serait pas la première fois. D’ailleurs, il était toujours étonnant de constater ce qu’on pouvait faire avaler comme mensonge sous prétexte de faire usage de sarcasme. Plus c’était gros, en général, et mieux ça passait. Cela dit, je ne pouvais pas m’y risquer avec Oyrania ; Je ne savais pas quels étaient ses doutes concernant sa mère, ni ses doutes me concernant, moi.

« Une bonne hygiène de vie et des crudités. » Répondis-je dans un sourire charmant.

Là était le risque quand on restait trop longtemps au même endroit. Les personnes de notre entourage grandissaient, vieillissaient, tandis que nous restions dans notre prime jeunesse. Avec le temps, ils commençaient invariablement à se poser des questions. Hadès et moi prenions soin de ne jamais rester plus d’une quinzaine d’années dans la même ville, précisément pour éviter ce genre de désagrément. Ainsi, d’ici quelques années, nous serons contraints de quitter Paris et laisser au monde le temps de nous oublier avant de pouvoir nous réimplanter à la capitale. Nous appréciions ces années coupées du monde. Nous en profitions pour nous retrouver.

Laissant de côté ces considérations, je prêtai une oreille attentive à Oyrania.

« J’ignorais que tu avais fait de longues études ! Toutes mes félicitations pour ta réussite, fis-je le plus sincèrement du monde. Après un instant, je repris d’un air songeur : la religion... Un sujet fascinant, il est vrai. Tu pensais concentrer ton étude sur une civilisation en particulier ? »

Elles étaient nombreuses. J’aurais été tenté de diriger son intérêt vers celle qui avait vu notre naissance. Par pur orgueil, car au regard d’autres panthéons qui étaient tombés dans l’oubli, nous avions eu plus que notre part sous le feu des projecteurs. Evidemment, ça n’était jamais suffisant pour les divinités que nous étions. Après tout, nous n’existions que pour être adorés. Et je l’étais toujours, d’une certaine manière ; J’avais fait en sorte de me constituer le culte que je n’avais jamais eu, de rassembler des fidèles autour de moi qui me louaient lors de leurs rituels de soins quotidiens. Les réseaux sociaux, auxquels je m’étais prêtée volontiers, avaient fatalement précipité mon ascension mais ma marque de cosmétiques n’avait rien à prouver à quiconque.

« Absolument ! M’exclamai-je dans un éclat de rire cristallin. Si tu es à la recherche de cosmétiques de qualité, tu es au bon endroit. »

Oui, je me jetais des fleurs. Mais à ma décharge, ce n’était pas sans raison.

Je ne relevai pas lorsque Oyrania mentionna Nyx en tant que sa mère, m’interrogeant toutefois sur la possibilité que cette information lui ait échappée. Non que ça ait une réelle importante, je savais de qui elle était la fille. Mais ce n’était pas le cas de tout le monde. Cela me questionnait aussi sur ce que la jeune femme savait de sa mère. Sa question, toutefois, balaya mes pensées.

« Oooh, des tas. On part sur des produits teints, du coup ? Tu cherches quelle couvrance ? D’un geste de la main, je l’invitai à me suivre jusqu’au rayon des fonds de teint, CC cream, BB cream et autres correcteurs. Les produits sont classés du moins au plus couvrant, je joignis le geste à la parole, et dans un souci d’inclusivité, nous proposons près de cinquante teintes pour toutes les teintes et sous-teintes de peau. On devrait trouver ton bonheur. Je peux ? »

Je tendis la main pour cueillir la sienne dans le creux de ma paume. Sur le dessus, j’étalai deux teintes que j’estimai les plus proches de sa carnation. Light neutral étant encore trop foncée à mon goût, j’étalai la teinte fair neutral. Pas encore tout à fait convaincue par la sous-teinte que j’avais choisi, je saisis un autre fond de teint en libre essai. Le résultat m’arracha un sourire satisfait.

« Ah, voilà. Fair cool. Parfait. Je levai un regard pétillant vers la jeune femme. Couvrance maximum assurée pendant douze heures. C’est un produit émolliant donc pas besoin de mettre de base dessous. Tu peux éventuellement le poudrer avec de la poudre fixatrice translucide pour atténuer le côté glossy si tu veux un fini mat et consolider la tenue. Une question me taraudait, toutefois. Tu as une si jolie peau, tu es bien sûre de ton choix ? Je peux t’orienter sur une crème teintée, si tu préfères. C’est beaucoup plus léger. J’ajoutai : et si c’est pour masquer des lendemains difficiles, notre collection de correcteurs se décline même en fonction du type de cerne. Elle a été primée le mois dernier d’ailleurs. »

Bref, c’était du solide. Je n’allais pas rentrer dans les détails des roues chromatiques et de quel anticerne choisir en fonction du sous-teint de sa carnation. L’important était de se dire : quoiqu’Oyrania ait besoin, Kore avait la réponse appropriée. Et moi aussi, du coup.

Sujet: Re: Maquillage pour femme mordue Dim 16 Oct - 20:13

Une bonne hygiène de vie et des crudités, dit-elle. Je n’en crois pas un seul mot et, pourtant, quelle autre explication peut-elle avoir ? La chirurgie esthétique peut être une raison mais j’en doute grandement : son visage est inchangé, et nul chirurgien peut réussir une telle prouesse ! Préférant ranger cette question dérangeante dans cette zone grise des incompréhensions, et des incertitudes, je me concentre sur la suite de la conversation.

- Si possible, je voudrais orienter mes recherches sur le panthéon greco-romain. Mes parents m’ont nourri des mille et une histoires sur les Dieux de l’Olympe, ainsi que sur bien d’autres divinités mineures mais tout aussi importantes, répondis-je, d’un ton sincèrement passionné. Il serait temps de changer cette vision très monothéiste du monde à une vision plus polythéiste et libre d’interprétation. Evidemment, c’est difficile. Les traditions des trois grandes religions monothéistes sont très ancrées.

C’est mon domaine, et il est tout naturel que je cherche à le fouiller davantage et à le promouvoir. Plus il y aura de croyants envers ces divinités passées, et plus j’ai de chances d’agrandir la Communauté de la Nuit et donc ma propre influence sur la Capitale – voire sur le monde. Seuls les plus faibles se contentent de maigres rêves. Les conquérants ont toujours eu une vision extraordinaire que beaucoup ont qualifié de folies à leur époque. Certains ont réussi et ont marqué l’Histoire de leur nom, d’autres ont simplement échoué mais réussis d’autres actions tout aussi louables.

Aussitôt après, nous parlons de maquillage. Plus elle parle, et plus la gêne s’installe. Je connais particulièrement bien les usages des différents produits mais aucun ne correspond exactement à ce que je recherche. Ou plutôt, je ne sais pas ce que je dois acheter pour cacher une morsure qui cicatrice. Comment puis-je l’exprimer, sans que je n’ai à révéler la marque ou à être considérée comme femme abusée ? Il y a du vrai à cette dernière affirmation mais en l’absence de l’identité du monstre - au sens littéral – et compte tenu des circonstances particulières – initiation de nouveaux membres au sein de la Communauté de la Nuit -, je préfère ne pas m’étaler sur le sujet et taire cette agression.

- Disons que j’ai eu droit à un copain un brin trop … expressif, au lit, commençais-je, sincèrement gênée. Disons que je garde une belle trace de … ses lèvres, au niveau du cou. Et, je ne sais pas exactement comment je peux couvrir. Mes crèmes habituelles, et mes correcteurs, sont assez … inefficaces, finis-je par dire, fixant difficilement cette dernière. Donc, il me faudrait un produit, ou plusieurs produits, extrêmement couvrant pour une belle trace rouge.

J’omets de dire que la trace rouge a, depuis longtemps, cédé à une trace bleutée. C’est une chose de subir les assauts d’un type trop excitée – et donc se taper des suçons assez impressionnants -, c’en est une autre d’avoir à cacher la morsure d’une chose – tout, sauf un humain.

Sujet: Re: Maquillage pour femme mordue Dim 30 Oct - 22:59

Quiconque posait une question telle que celle-ci devait avoir des doutes quant à la réponse qui était fournie. Evidemment, je constatai sans trop de surprise que je ne l’avais pas convaincue avec mes histoires de crudités... Le contraire m’aurait surprise, à dire vrai. Mais elle eut le bon sens de faire comme si c’était une réponse des plus sensées et que c’était même la seule explication rationnelle à ma jouvence manifeste. C’était mieux ainsi. J’aurais pu parler de chirurgie esthétique, aussi, ou de la redoutable efficacité de mes produits. Ils étaient efficaces, cela allait sans dire, mais ils n’étaient pas pour autant miraculeux. Quant à la chirurgie esthétique, quelle image cela aurait-il renvoyé de moi ? Non, ce n’était pas envisageable. D’un autre côté, même si je culpabilisais de lui dissimuler la vérité, je ne pouvais pas compromettre mon identité par les temps qui couraient. Pas plus que je ne pouvais compromettre celle de Nyx. Peu importe combien j’en étais désolée.

« Ah, le panthéon gréco-romain, soupirai-je. Passionnant, tout simplement passionnant. En toute objectivité, évidemment. Je repris : j’ai quelques contacts du côté du Louvre, si ça peut t’intéresser de t’entretenir avec des spécialistes du sujet. J’ai aussi une collection personnelle qui pourrait te plaire si un jour tu as l’envie d’y jeter un coup d’œil. J’esquissai un sourire bienveillant. Je serais ravie de pouvoir t’aider. Tu n’as qu’à demander. »

C’était, après tout, le moins que je puisse faire pour elle... Et c’était aussi un peu par vanité, je devais l’admettre. Mais d’un autre côté, qu’y avait-il à attendre d’une déesse qui avait nommé sa marque de cosmétiques d’après elle-même ? Cela dit, ma proposition était des plus sincères et je tenais à ce qu’elle sache que ma porte lui était ouverte si le besoin s’en faisait ressentir. Pour ça ou pour toute autre chose d’ailleurs. Cela dit, ce dont elle a besoin dans l’immédiat c’était de mon expertise en maquillage.

« Oh, je vois, fis-je sans jugement aucun à sa confession teintée d’embarras. Je laissai un sourire bienveillant fleurir à mes lèvres. Une marque qui a viré au bleu avec le temps, j’imagine ? Laisse-moi voir un peu... »

Je me tournai vers le rayon, que je scrutai d’un œil expert. Pour en avoir moi-même décidé l’agencement, trouver ce que je cherchais ne prit qu’un instant ; Je sélectionnai sans la moindre hésitation trois sticks teintés, ainsi qu’un fond de teint et une poudre libre. Je tendis une main vers elle afin qu’elle y glisse la sienne et y étalai délicatement les produits – tant pour y constater la teinte que lui fournir un brin d’explication. Avec un support visuel, c’était toujours mieux ! Je ne me perdis pas en explication au sujet de la complémentarité des couleurs et de pourquoi les choix que j’avais fait... En l’état ça n’avait pas une grande importance. Elle voulait de l’efficacité, pas un cours.

« Bien. Tout ce dont tu as besoin de te rappeler c’est : vert sur les zones rouges, indiquai-je en désignant la ligne correspondante, jaune quand ça vire au violet et orange quand ça devient bleu. Avec ça, tu vas pouvoir neutraliser les couleurs mais par-dessus, il va falloir que tu appliques ce fond de teint pour homogénéiser le teint. Tu attends un peu que le produit s’adsorbe sur ta peau et enfin tu appliques la poudre pour fixer le tout. Avec ça, je peux te garantir une tenue optimale pendant douze heures, minimum. Sans transfert, sans migration. J’eus un sourire. Tu penses que ça va aller ? Je peux te montrer si tu veux. »

Rien ne valait mieux que de tester en conditions réelles, mais loin de moi l’idée de l’y forcer. Après tout, elle n’était peut-être pas très à l’aise à l’idée de me montrer... Enfin, voilà quoi.

Sujet: Re: Maquillage pour femme mordue Mer 16 Nov - 15:03

J’aurais bien voulu que l’affaire se limite à un suçon. Malheureusement, ce n’est pas le cas. Ma peau a été considérablement malmenée et cicatrise avec grande peine. Je désespère que je ne pourrais pas sortir sans écharpe avant l’été prochain. Or, avec ma profession, je ne peux pas me permettre d’attendre autant. Il me faut, à tout prix, un set complet de maquillage extrêmement couvrant !

Anthea répond à la demande, splendidement. Elle ne montre nulle suspicion à cette histoire à dormir debout, me rassurant un tantinet. Je n’aurais pas à craindre qu’elle rapporte cette interaction à ma mère. Cette dernière a toujours été un brin plus méfiant, devinant aisément lorsque je mens ou dis la vérité. Je crois, sans exagérer, que mes parents sont les seules personnes que je ne pourrais jamais tromper – qu’importe que je sois un as de l’escroquerie. L’un ou l’autre ont une connaissance très fine de la nature humaine, démêlant aisément le vrai du faux …

Instinctivement, je porte la main au cou.

- Non … je suis assez gênée, minaudais-je. Je te fais confiance. Je vais acheter cette belle panoplie..

La blessure date d’une semaine, à peine. Je ne sais pas si la belle et douce brunette acceptera, encore, de croire à mon histoire de petit copain expressif si son regard se pose sur la marque nette de dents. Est-ce que je peux encore la mener en barque, en sous-entendant que je suis adepte de quelques pratiques violentes ? Je suis bien dubitative à ce dernier point. Fort dommage qu’il n’existe pas une bête capable de causer, exactement, cette marque !

- Par contre … Est-ce que tout ça peut rester entre toi et moi ? Disons que ce type et moi, ce n’est pas vraiment sérieux. Et je voudrais bien éviter que … Midnight n’en sache rien. Elle peut être curieuse par moment.

Si maman est assez discrète et ne se mêle pas de mes affaires, elle a assez d’instincts pour deviner que quelque chose ne va pas. Par exemple, que sa fausse blondinette chérie porte un foulard en tout temps et en toute heure sur les prochaines semaines, ou mois … Il n’est pas question de protéger un monstre. Non, loin de là ! Je veux comprendre avant d’émettre une quelconque plainte. Qui sait ! Je peux tirer un avantage dans l’affaire ! A côtoyer les créatures de la nuit, nous apprenons vite à voir par-delà le crime, l’horreur ou le monstrueux. Un drogué peut devenir votre meilleur ami, un mafieux peut devenir votre garde du corps et j’en passe !

- Maintenant que j’y pense … Tu ne m’as jamais dit comment tu as rencontré Aleksandros.

Mon téléphone vibre. Je le saisis, décroche et raccroche aussitôt.

- Je dois te laisser, désolé ! Mon père a besoin de moi pour une course urgente. J’avais complètement oublié cette promesse !, mentis-je.

C’était bien mon père, mais nullement pour une course. Un aspirant à notre communauté ne donne plus de signe de vie depuis une semaine et les flics investiguent rapidement. Moi, je sais ce qu’il est advenu de lui. Mais je ne l’ai dit à personne, incluant mon père. Alors, je vais maintenir le silence et je vais prétendre ne rien savoir.

Il a disparu, voilà tout.
Je ne dirais pas que j’ai vu un blondinet déchiqueter son cou et le sucer jusqu’à la moelle.
Oh non, je ne dirais pas.
Je ne désire pas finir en hôpital psychiatrique !

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