Prise de contact [Midnight]

« Madame, vous avez reçu un message de la part de quelqu'un qui semble vous connaître... Personnellement. » Attablée devant le book recueillant toutes les animations diverses que Nyx prévoit de donner dans ses clubs pour le mois, la déesse relève un regard interrogateur vers Zhu Li, sa dévouée assistante dédiée aux réseaux sociaux. La demoiselle ne se formalise pas de l'absence de réponse verbale de la part de son employeuse, vu qu'elle-même ne décroche que rarement les yeux de ses différents écrans, ici son téléphone. « Il vient de Callista Argyre. Apparemment, elle tient une agence matrimoniale sur Paris... » Le sourcil de la Nuit se hausse, et elle tend une main, dans laquelle la zélée Zhu Li abandonne son téléphone. L'écran sous les yeux à son tour, Nyx reconnaît sans peine Héra, la reine des olympiens, à sa petite photo de profil. « Transmettez-lui mon email personnel, voulez-vous Zhu Li ? » La demoiselle hoche la tête en signe d'assentiment en reprenant son téléphone, ainsi que son travail, travail auquel Midnight est déjà retournée...

[...]

Ce n'est pas tous les jours que la reine de l'Olympe vous invite à déjeuner... Sans la moindre amertume, mais avec un certain cynisme, Nyx, en faisant tournoyer la rondelle de concombre dans son verre d'eau pétillante, ne peut s'empêcher de se dire qu'une telle invitation n'aurait jamais trouvé l'entrée de son antre tartarienne... Du reste, Héra n'avait jamais fait appel à sa tante. Personne n'avait jamais fait appel à Nyx, en dehors de ses enfants, et ça lui convenait parfaitement ainsi. Pour autant, la Nuit mentirait si elle arguait ne pas être curieuse des raisons d'Héra de vouloir prendre contact. Des millénaires qu'elles ne se sont pas adressé un mot, qu'elles n'ont pas eu besoin ou envie de le faire. Pourquoi maintenant ? A cause des Halles ? De la mort de plusieurs des leurs ? Peut-être tout cela à la fois ?

A priori, elle le saura bientôt.

Par souci de discrétion, ne souhaitant pas être interrompue ou emprisonnée dans ce restaurant par l'afflux de fans, Nyx avait choisi l'endroit, l'heure et la table à laquelle elle se trouvait à présent, à attendre patiemment sa nièce, nièce qui finit par entrer, toute éclatante de son charisme de reine des olympiens, dans le restaurant. Confortablement assise, la Nuit suit des yeux Héra la rejoindre, non sans un petit sourire en coin, sourire qui s'élargit sensiblement quand sa comparse prend la peine de lui dire qu'elle est contente de la voir. Même si la souveraine a l'air sincère, Nyx ne parvient pas à la croire. Pas tout à fait en tous cas. En dehors de certains de ses enfants, personne n'est jamais heureux de la voir, sa compagnie n'ayant rien de recherché. Sans prendre ombrage de ce pieux mensonge, Nyx laisse glisser, sans le lui rendre, parce qu'elle-même n'est pas spécialement contente de cette rencontre... Oh, elle n'a rien contre ! Mais rien de vraiment pour non plus. En fait, sans son insatiable curiosité, elle ne serait pas venue.

Après tout, Nyx abhorre, et a toujours abhorré, les olympiens, et le règne de Zeus encore plus. Il n'y a jamais eu que ses propres enfants ainsi que Perséphone, sa fille adoptive de par sa présence aux Enfers six mois de l'année, dans le temps, pour trouver grâce à ses yeux. Tous les autres... Bah. Cela étant, il n'est pas question ici d'écraser Héra de son mépris, loin s'en faut. Quelque part, Nyx a toujours eu de la peine pour cette reine délaissée par son volage époux, duquel elle vaudrait bien dix fois la valeur sans sa colère destructrice et sa jalousie maladive... Elles auraient pu être amies si la reine n'avait pas trouvé intéressant de mêler ses enfants à leurs histoires de couple. « Bienvenue à toi, Héra. » La déesse salue sobrement sa comparse, ses lèvres arborant toujours le même sourire sibyllin. Après tout ce temps, a-t-elle dit. « Ça doit bien faire deux centaines de vies que nous ne nous sommes pas vues... » Une éternité, même pour les dieux. « J'imagine que cette invitation à déjeuner concerne de récents développements ? » Elle demande, ancrant avec douceur son menton sur ses doigts croisés, sans la moindre gêne à à peine se montrer polie pour mettre directement les deux pieds dans le plat. A la décharge de la Nuit, si elles devaient rattraper le temps perdu depuis qu'elles ne se sont pas vues, ce serait très étrange... Et surtout interminable ! Autant aller à l'essentiel, du coup, non ?